La visite de l’exposition Manga. Tout un art ! et de son petit compte rendu me donne l’occasion de dresser ensuite un petit bilan des expos BD faites en 2025. L’année prochaine, celles-ci devrait être en forte diminution du fait de l’absence du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême. Cependant, chaque chose en son temps, intéressons nous à 2025 dans ce dernier billet de l’année.
Manga. Tout un art !
Dernière exposition de l’année pour notre petit groupe de mangaversien·ne·s. Sa visite s’est organisée un peu au dernier moment entre moi, Taliesin et Tanuki suite à une remarque de ce dernier. Il s’agissait d’une animation organisée avec l’INALCO un jeudi soir, mais celle-ci était très mal expliquée : médiation, oui, mais sous quelle forme exactement ? En fait, il s’agissait d’une nocturne à entrée libre (uniquement pour l’exposition temporaire, les permanentes étaient fermées). Bon plan : on pouvait visiter gratuitement l’exposition entre 18h00 et 22h00 (21h45 en réalité) avec une dizaine d’étudiant·e·s qui présentaient les œuvres des différentes salles. Cerise sur le gâteau, comme prévu et à la différence d’un premier dimanche du mois (gratuit), il n’y avait pratiquement personne.
Le but de l’exposition (tel que présenté dans le dossier de presse) est de montrer que le manga n’est pas qu’une industrie du divertissement mais aussi un art dont les racines plongent dans l’histoire complexe du pays en rapprochant bande dessinée et art japonais ancien, des statues bouddhiques aux estampes en passant par le théâtre, la littérature et les croyances ancestrales. But atteint ? Oui pour la partie Japon ancien, pas trop pour le manga. Étant donné que Didier Pasamonik est le co-commissaire pour la partie bande dessinée, cela est tout sauf une surprise tant il n’y connait pas grand-chose… La scénographie est déséquilibrée, il y a des manques importants, notamment dans les cartels, ainsi que quelques confusions, le propos est parcellaire et très grand publique (ce qui est normal pour ce dernier point). Néanmoins, c’est l’occasion de voir des planches originales de manga, ce qui n’est pas fréquent, surtout hors festival d’Angoulême.
L’exposition principale, située au sous-sol, est composée de huit espaces dédiés à un thème différent. Disons que c’est plutôt intéressant jusqu’à celui consacré à Shigeru Mizuki et qu’après c’est assez raté. On a ainsi l’occasion de voir pour commencer des revues de la fin du 19e et du début du 20e siècle, puis une rapide présentation du kamishibai, une série de planches originales de Norakuro, une salle dédiée à Osamu Tezuka (avec des originaux de Princesse Saphir et d’Astro, le petit robot, entre autres), une autre consacrée au gekiga avec de nombreuses planches d’Hiroshi Hirata, accompagnées de quelques belles pièces de Shitaro Sanpei, Kojima Goseki, Kazuo Kamimura, Yoshiharu Tsuge (merci à MEL qui a une bien belle collection et qui nous permet de la voir). Enfin, la dernière montre des yokai de Shigeru Mizuki grâce à un prêt d’originaux de sa fondation (tout comme Tezuka Prod. et Ryoko Ikeda qui en ont envoyé du Japon pour les espaces les concernant).
La partie shôjo manga est scandaleusement minuscule et centrée uniquement sur deux autrices dont il y avait quelques originaux (La Rose de Versailles de Ryoko Ikeda et des planches de Kaze Kaoru). En plus, le médiateur de cette salle était nul, à la différence de celui sur Tezuka. La partie shônen manga est trop étalée le long du couloir courbe avec peu de reproductions, quasiment aucunes planches originales en dehors de Fairy Tale, se concentrant uniquement sur quelques titres à succès (dont Dragon Ball, One Piece, Naruto, Demon Slayer) avec une mise en parallèle avec le folklore chinois et japonais. Cette mise en parallèle, intéressante, aurait pu se trouver dans un espace plus resserré. Le seinen manga est ramené à sa seule dimension apocalyptique avec Akira et L’Attaque des titans. Un petit focus sur Hiroshima avec des planches de Gen aux pieds nus est heureusement présent, mais avec le seinen manga. Passons sur la dernière salle, consacrée à la mode, sans intérêt si ce n’est de rigoler devant certaines tenues tant elles sont ridicules.
Avant les mangas
Située au deuxième étage dans la rotonde, cette partie de l’exposition est consacrée à des œuvres proposant des caractéristiques que l’on retrouve dans les mangas telle que le mélange texte et image, dessins dynamiques, des thèmes tels que l’humour, l’aventure, le fantastique, etc. L’essor commercial de l’édition est ici mis en avant avec l’exposition de nombreux ouvrages d’époque, généralement imprimés en noir et blanc sur un papier de qualité médiocre.
Sur la partie extérieure de la rotonde, des rouleaux illustrés sont proposés à la lecture en plus des nombreuses illustrations accrochées aux murs. Dans la partie intérieure, ce sont de nombreux livres qui sont mis en valeur. C’est toujours intéressant d’en voir, et surtout de constater la qualité graphiques des illustrations, surtout quand on connait les méthodes d’impression de l’époque. Clairement la partie la plus intéressante et la plus impressionnante à nos yeux. Des récits s’étirant sur plusieurs tomes sont proposés au public de l’époque, qui est friand de littérature dite populaire. Il est donné de voir un exemplaire de la Manga de Hokusai, ainsi que de Kawanabe Kyôsai. Ici, « manga » signifie « caricature » et non « bande dessinée ».
Sous la grande vague
À côté de la rotonde, le musée a pris l’habitude de proposer une petite exposition, souvent de photographies. Actuellement, l’endroit propose de voir l’estampe Sous la vague au large de Kanagawa de Katsushika Hokusai qui fait partie de la série des Trente-six vues du mont Fuji.
La salle est toute petite, il ne faut pas être en nombre si on veut en profiter. Il y a quelques illustrations et planches de BD dont une de Moebius qui rendent hommage à fameuse l’estampe. Du fait de la fermeture du Musée, nous n’y sommes pas restés longtemps et n’avons pas pu profiter de la vidéo projetée sur un écran géant qui « invite à un voyage poétique et immersif au cœur de cette œuvre iconique » (dixit le dossier de presse). Pas grave, j’ai eu le temps de prendre en photo Taliesin devant l’estampe, continuant ainsi une tradition vieille de plus de 15 ans 🙂 .
Le catalogue
Si l’exposition principale est plus que perfectible au niveau de son contenu, ce n’est heureusement pas le cas du catalogue. Constitué d’un grand nombre de courts chapitres, chacun abordant un thème précis, ils sont écrits par des spécialistes, la plupart étant des universitaires. Il est rédigé dans un français facile à lire et les pages se tournent avec plaisir tant l’essai de vulgarisation est réussi. Il est richement illustré même s’il manque des reproductions de planches originales et que certains textes n’ont aucune iconographie. Au moins, Moto Hagio, Rumiko Takahashi et Mitsuru Adachi ne sont pas ignorés malgré l’absence de visuels de leurs créations.
Le papier est mat, agréable et le tout est bien imprimé dans une couverture souple tout à fait réussie. Le seul bémol que je pourrai faire est que le prix est un peu excessif, un montant de trente euros me semble être plus juste pour une telle fabrication. Cependant, cela a dû permettre une meilleure rémunération des autrices et auteurs des textes (enfin, je l’espère). Je conseille donc son achat même si on n’a pas l’occasion d’aller voir l’exposition, qui est assez dispensable, il faut l’avouer.
Bilan 2025 des expos BD
L’exposition Manga. Tout un art ! est donc venue clore une année d’expositions. Si on compare avec les années précédentes, leur nombre est en recul alors que je m’attendais à une augmentation. En ce qui concerne les bandes dessinées il y en a eu 13 en 2025 (19 en 2024), cela avait commencé fin janvier à la galerie Achetez de l’art puis au festival d’Angoulême pour se terminer en ce mois de décembre à Guimet. Voici un petit tableau récapitulatif :
Type
Nombre d’expositions
Arts
10
BD-Comics-Manga-Illustration
13
Culture Asiatique
1
Culture autres régions
2
Divers
1
Musique
1
Histoire
2
Total
30
Soit 16 en Musées, 4 en Espaces culturels / Fondations & instituts / Maisons de la culture, 8 en Galeries et 2 en Autres lieux.
Pour retracer cette année, voici une petite sélection de photos. Elle montre l’importance du festival d’Angoulême en matière de qualité et d’intérêt, expositions qui seront absentes à notre programme en 2026. J’y ai ajouté celles qui n’ont duré que le temps de la manifestation concernée et qui ne sont donc pas comptabilisées dans le tableau ci-dessus.
Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême
Festival BD (Formula Bula, SoBD)
Galeries (Achetez de l’art, Galerie du 9ème art et Galerie Martel)
Soit Shin Zero à la Galerie Achetez de l’Art, Super-Héros & cie, l’art des comics Marvel et Plus loin, la nouvelle Science-Fiction au Musée de la bande dessinée, Superman. Le héros aux mille-et-une vies à la Cité Internationale de la Bande Dessinée et de l’Image, Posy Simmonds. Herself au Musée d’Angoulême, L’Atelier des sorciers : la plume enchantée de Kamome Shirahama à L’Hôtel Saint-Simon, Gou Tanabe × H.P. Lovecraft, visions hallucinées à l’Espace Franquin, Aline Kominsky-Crumb. Le Plein d’amour à Césure, Le Musée éphémère d’Anne Simon, La BD chilienne contemporaine à la Halle des Blanc-Manteaux, American Classics XI à la Galerie du 9ème art, Adrian Tomine à la Galerie Martel, Kabuki – Guilherme Petreca, Soli Deo Gloria – Edouard Cour puis Silent Jenny – Mathieu Bablet à la Galerie Achetez de l’Art.
La suite l’année prochaine… On verra bien ce qu’il sera possible de faire.
En décembre 2025, j’ai eu à nouveau l’occasion de proposer une conférence présentant le manga à des classes de seconde du lycée Jean Monet de la Queue lez Yvelines. Le but était de présenter le fonctionnement de l’industrie du manga au Japon, d’évoquer sa mutation vers le numérique à partir ce que l’on peut en observer des publications disponibles en francophonie. Cette présentation s’est ensuite élargie au webtoon, cette forme d’expression d’origine coréenne, puis à l’apparition d’une bande dessinée francophone directement inspirée du manga : le manfra. Voici cette conférence dans une version rédigée et développée.
Première partie
Le terme manga fait normalement référence à la bande dessinée japonaise. Pour beaucoup, cela englobe aussi les dessins animés (au Japon, on parlait à une époque de terebi manga même si le terme anime, venu des USA, a pris de l’importance depuis de nombreuses années), ainsi que toutes les illustrations d’inspiration « manga », le cosplay, etc. c’est-à-dire tout ce que l’on pourrait regrouper dans un ensemble nommé « culture manga ». Au Japon, pour la bande dessinée, on parle d’ailleurs plutôt de komikku (comics). Nous allons ici nous concentrer principalement sur l’aspect livre de cet univers manga et voir comment il est créé au Japon.
Il est difficile de caractériser le manga sans faire de généralités tant la bande dessinée japonaise est variée. Néanmoins, un certain nombre de caractéristiques sont relativement communes et associées au manga par le sens commun.
Si en France, on connaît les mangas principalement sous forme reliée, au Japon, les mangas sortent généralement dans des magazines de prépublication. Une fois qu’il y a assez de chapitres et donc de pages, le manga sort en format relié, c’est-à-dire sous la forme d’un livre (tankobon) comprenant 140 à 220 pages (180 le plus souvent). Certains magazines sont hebdomadaires, d’autres bimensuels, mensuels, trimestriels, voire annuels (les « spéciaux »).
Il existe de nombreux magazines de prépublication (mangashi) et ils visent tous une tranche d’âge et un genre. C’est un marché très segmenté et c’est donc en fonction du public principalement visé que l’on va les classifier. Ceci dit, les magazines papiers sont de plus en plus remplacés par des sites internet de prépublication qui sont plus multi-audiences (par exemple le webzine Ura Sunday). Et comme les classifications japonaises sont assez mal utilisées en France, il vaudrait peut-être mieux les oublier pour s’intéresser plutôt aux types d’histoires proposées, comme le fait un éditeur comme Akata. Néanmoins, étant utilisés par quasiment tout le monde, voici un rappel des principales classifications qui sont faites : shônen, shôjo, seinen, josei mais aussi kodomo, etc.
Il s’agit là de cœurs de cible, le lectorat est plus étendu et les limites des catégories sont parfois assez floues. Les filles ou les adultes peuvent lire du shônen là où on ne verra quasiment aucun garçon lire du shôjo. Il y a aussi de nombreux genres qui sont abordés dans des magazines spécialisés. Ils ont aussi un cœur de cible axé sur le thème qui compte plus que la tranche d’âge et le sexe. Voici quelques exemples de mangas de genre : horreur / fantastique, mah-jong, Gundam (franchise à succès mettant en scène des robots géants) , boys’ love (yaoi), érotisme ou pornographie, lolicon (lolita complex) / moe (mignon), yonkoma (gags en quatre cases), etc.
Néanmoins, cette classification en fonction de la cible ne montre pas la diversité éditoriale qui existe au sein d’un même magazine de prépublication. Par exemple, un mangashi de plus de 600 pages peut contenir une quarantaine de séries qui peuvent aller d’une page (gag manga) à quarante planches (généralement seize dans le cadre d’un hebdomadaire), ce qui permet d’avoir beaucoup de variété dans les styles de dessin et les types de récits. Voici quelques exemples de mangas regroupés selon leur thème et distingué selon leur cible éditoriale. Les magazines étant assez épais, ils permettent de proposer une grande variété de thèmes
Deuxième partie
Quelques grandes dates de l’histoire du manga au Japon :
1902 : Première véritable bande dessinée japonaise. À l’époque, la BD est quasi- exclusivement diffusée dans la presse, notamment satirique. 1914 : Création du Shônen Club, magazine (mensuel) pour les garçons. Il y a peu de BD à l’intérieur, surtout du rédactionnel, des prépublications de romans courts, des illustrations. Au fil des années, le manga va prendre de plus en plus de place dans les magazines pour enfants. 1923 : Arrivée du Shôjo Club pour les filles. 1947 : Sortie de La Nouvelle île au trésor d’Osamu Tezuka et de Shichima Sakai, un akahon (manga au format livre à petit prix surtout diffusé dans la région d’Osaka) qui connait un grand succès et lance le story manga (c’est-à-dire une histoire longue, dynamique, épique). 1955 : Des tankobon reprenant les histoires prépubliées rencontrant le plus de succès sont édités pour la première fois en ce qui concerne le manga moderne (mais le système existait déjà dans les années 1920, notamment pour les romans et les illustrations). 1956 : Passage au rythme hebdomadaire de plusieurs magazines, ce qui entraine un développement du manga et une forte demande d’auteurs, ce qui permet à la profession de se féminiser durant les années 1960. Auparavant, il n’y avait pratiquement que des hommes auteurs de manga, même pour les magazines qui s’adressaient aux filles. 1959 : Lancement du Weekly Shônen Magazine de Kodansha et du Weekly Shônen Sunday de Shôgakukan, les deux plus gros éditeurs de livres et de magazines au Japon. 1963 : Lancement du Margaret de Shueisha (principal mangashi pour les filles, qui a joué un rôle très important dans le développement du manga au féminin). 1965 : Arrivée de Garo, premier magazine alternatif proposant du gekiga (manga sombre, se voulant plus ou moins social, pour un public plus âgé). 1967 : Lancement du Manga Action Weekly de Futubasha, premier magazine seinen. 1968 : Lancement du Weekly Shônen Jump de Shueisha (principal mangashi pour les garçons) et du Big Comic de Shôgakukan (seinen). 1994 : Le Weekly Shônen Jump est au sommet avec un peu moins de 6,5 millions d’exemplaires imprimés chaque semaine. Le tirage est inférieur à 2 millions depuis 2017 mais il reste de loin le plus important de tous les magazines de manga. 1996 : Début de la crise du marché du manga. 2005 : Le chiffre d’affaire des tankobon dépasse celui des mangashi. Les magazines papier ont vu leurs ventes chuter, beaucoup ont disparu et la prépublication se fait de plus en plus sur Internet, surtout depuis le début des années 2010. Par contre, les ventes de mangas reliés restent relativement stables, preuve d’un changement de consommation du manga par les lecteurs. 2017 : Le chiffre d’affaire du manga numérique a officiellement surpassé celui des ventes papiers (magazines et tankobon).
Troisième partie
Tout part donc du magazine de prépublication (sauf rares exceptions comme celle des anthologies). Chaque magazine a un rédacteur en chef qui dirige le mangashi et qui définit la ligne éditoriale. Il y a surtout une équipe d’éditeurs (tantosha), ceux-ci étant chargés de superviser un certain nombre d’auteurs (mangaka). Ce sont les tanto qui vont voir avec chaque auteur·e dont ils ont la charge comment réaliser un chapitre pour le prochain numéro à paraitre. Le rythme de parution du magazine conditionne la taille du chapitre et la fréquence des réunions. Pour un hebdomadaire, l’auteur·e doit produire généralement 16 pages. Pour un bimensuel, on est généralement à 20-30 pages, pour un mensuel, c’est entre 40 et 60 pages.
Comment devient-on mangaka ?
La plupart des auteur·e·s sont devenus mangaka en ayant gagné un des nombreux concours pour débutants qui existent dans de nombreux magazines de prépublication. C’est la voie privilégiée de recrutement des magashi. Mais auparavant, ces apprentis mangaka ont beaucoup dessiné depuis l’enfance et ont généralement fait partie du club manga de leur école (notamment au lycée, mais aussi à l’université). Ils ou elles ont ainsi fait du manga en amateur avant de tenter de passer professionnel. Ils ou elles peuvent aussi avoir passé plus ou moins de temps en tant qu’assistant·e dans un studio avant de réussir à placer une histoire ici ou là.
Il existe aussi des écoles préparant au métier de mangaka. Ce sont généralement des écoles privées post-lycée ou un enseignement que l’on suit en cours du soir lorsqu’on est étudiant. Depuis plusieurs années, être dojinshika à succès permet aussi de débuter une carrière professionnelle, surtout dans le domaine du shôjo manga sans avoir eu besoin de gagner le concours d’un magazine. Enfin, la recommandation est aussi une façon d’être engagé·e.
Avec la crise du manga qui dure depuis de nombreuses années, les rédacteurs en chef des magazines de prépublication (surtout shônen) ont été obligés de renouveler leur ligne éditoriale et surtout de chercher de nouveaux profils en dehors de la voie de recrutement privilégiée du concours de débutants, les histoires soumises étant souvent estimées par le jury comme étant d’un niveau trop faible et étant trop formatées.
Lorsqu’on a remporté le premier prix ou un des accessits d’un concours (il y en a un tous les ans ou tous les six mois, chaque magazine important ayant le sien), on reçoit une certaine somme correspondant au prix remporté. Surtout, on est remarqué et pris en charge par l’équipe rédactionnelle. L’histoire primée est généralement publiée dans le mangashi organisant le concours (ou une de ses déclinaisons), parfois dans un numéro spécial thématique, parfois en bouche trou en cas de retard de remise d’un chapitre par un·e des auteur·e·s du magazine. Les tanto vont aussi commander une ou plusieurs histoires qui serviront éventuellement de bouche-trou ou seront publiées dans une des déclinaisons du mangashi (les numéros spéciaux permettent notamment de le faire). Si le succès est au rendez-vous, une série régulière est alors mise en place. C’est le début d’une carrière stable de mangaka… Enfin, stable tant que les histoires plaisent un minimum, chaque magazine demandant de noter les histoires publiées dans le numéro grâce à des cartes réponses, même si ce système de notation a tendance à disparaître. Il n’est pas possible ni nécessaire pour la prépublication sur le web, par exemple. Dans ce cas, il est facile de savoir quelles séries plaisent et lesquelles ne rencontrent pas leur public.
Les auteur·e·s sont rémunéré·e·s pour la prépublication (parfois insuffisamment), puis touchent des droits d’auteurs sur les versions reliées. Surtout, ils ou elles gardent les droits pour les produits dérivés (sauf s’il s’agit d’un travail de commande, le manga étant alors lui-même un produit dérivé). De ce fait, il est très important pour les mangaka d’avoir une adaptation en animé car cela rapporte, financièrement parlant, et donne un coup de projecteur important sur la série.
Les mangaka travaillent rarement seul·e·s, ils ou elles montent un studio et réalisent leur manga en équipe (payée sur les propres revenus des auteur·e·s). Ils ou elles sont généralement assisté·e·s par des personnes (les assistant·e·s) qui vont réaliser des tâches précises (gommer les crayonnés, poser des trames, dessiner telle ou telle partie du décor, etc.). Le nombre d’assistant·e·s est très variable, il dépend du nombre de pages à rendre, des séries en cours. Cela peut aller de un à plus d’une dizaine. Généralement, plus on s’approche de la date de rendu, plus il y a d’assistant·e·s. Dans les années 1970, Osamu Tezuka avait mis en place les 3 × 8 : il avait trois équipes d’assistants qui se relayaient 24 heures sur 24 dans les locaux de l’auteur. Le studio est généralement situé dans un appartement loué pour l’occasion (permettant de dormir sur place en période de bouclage) ou chez l’auteur·e dans une pièce dédiée à cet usage.
Un chapitre est généralement réalisé ainsi : L’auteur·e conçoit le scénario en réalisant un brouillon, une sorte de story-board qu’on appelle le name (namu). Ce brouillon contient les dialogues, les grandes lignes de la mise en page (la narration). Ensuite, l’auteur·e va rencontrer son ou sa tanto pour en discuter, soit dans les bureaux du magazine, soit dans un café. Les tanto peuvent demander des changements (et ne s’en privent pas), estimant que telle ou telle partie n’est pas assez bonne, donnant ainsi des conseils pour rendre l’histoire plus attractive. Cela peut concerner un point de vue, un enchainement de cases, un dialogue, etc. Une fois que mangaka et tanto sont d’accord sur le chapitre, il est temps de passer au crayonné. C’est l’auteur·e qui s’en occupe et qui dessine toute les pages au crayon. Ensuite, c’est la phase de l’encrage. L’auteur·e peut s’en occuper entièrement ou déléguer une partie plus ou moins importante du dessin à encrer (les décors, les onomatopées, une partie des personnages). Les trames sont généralement posées par les assistant·e·s, tout comme la typographie des dialogues (qui peut aussi être faite par l’imprimeur). Une fois que tout est terminé (généralement juste à temps), les planches sont rendues au tanto qui les remet à l’imprimeur. Depuis quelques années, la transmission des planches se fait par Internet car l’outil de travail est de plus en plus informatisé.
Pour un hebdomadaire, cela occupe généralement six jours sur les sept de la semaine. Le dimanche, l’auteur·e peut se reposer. Les assistant·e·s, pour un hebdomadaire, interviennent généralement les trois derniers jours. Mais cela peut varier d’un·e auteur·e à l’autre, selon sa façon de travailler. Créer des histoires pour un mensuel donne plus de temps pour s’organiser, mais il y a souvent plus de planches à produire. Il est à noter que certain·e·s passent d’un magazine hebdomadaire à un mensuel car ils ou elles n’arrivent pas à suivre le rythme ou que cela correspond mieux au récit. Il y a aussi la possibilité de paraitre un numéro sur deux.
De plus en plus, les mangashi ne sont plus imprimés mais sont disponibles uniquement sur Internet. La lecture sur téléphone portable est une façon de consommer du manga qui est de plus en plus importante au Japon.
Caractéristiques
Comme cela a déjà été évoqué, faire du manga consiste à reprendre plus ou moins plusieurs caractéristiques de la bande dessinée japonaise.
La première des caractéristiques du manga est certainement le noir et blanc et le petit format qui les font ressembler à nos livres de poche. En effet, pour des raisons historiques de coût de création et de fabrication, le choix du N&B s’est imposé dans le développement des magasines d’après-guerre (avant, ils étaient fréquemment en couleur ou en bi ou trichromie). Les trames (mécaniques, c’est-à-dire autocollantes, puis informatiques) ont rapidement permis de donner du volume au dessin en l’absence de couleur. Cette utilisation des trames donne un cachet particulier au dessin qui est spécifique au manga. Il faut dire que les trames sont très variées au Japon et permettent de réaliser de nombreux effets, même si cela ne se voit pas trop sur certaines créations. La taille des mangas reliés est souvent comprise entre A5 (les deluxe) et A6 (les bunko). Le format le plus commun est le B6.
La deuxième est sans aucun doute les « grands yeux » qui peuvent occuper jusqu’à un quart du visage (sourcils compris), surtout chez les personnages féminins. Il ne s’agit pas de ressembler aux Occidentaux comme cela a été trop rapidement affirmé par les détracteurs du manga mais d’appliquer le principe de la néoténie au manga. En bande dessinée, il s’agit de la conservation de certains caractères de l’enfance afin de provoquer un attachement, une attirance inconsciente et abstraite chez les humains, y compris envers les animaux. Un bon exemple est celui du Chat potté dans Shrek 2, qui rappelle le chaton lorsqu’il fait les grand yeux. Utilisée en bande dessinée, cela provoque un sentiment de sympathie, crée une plus forte emprise sur les lecteurs. Walt Disney a énormément utilisé ce principe, vraisemblablement de façon inconsciente, notamment pour distinguer les gentils des méchants et créer une sorte d’attirance envers ses personnages. Mais Disney lui-même n’a rien inventé car on peut trouver des usages de la néoténie dans l’art du XIXe siècle. Au Japon, c’est aussi le succès dans les années 1920 des illustrations de Yumeji Takehisa dont le style a été de nouveau popularisé après-guerre par Jun’Ichi Nakahara qui peut expliquer l’importance des grands yeux dans la culture shôjo. Il ne s’agit donc pas d’une invention d’Osamu Tezuka qui était un grand amateur de Disney et connaisseur de l’imagerie née dans les magazines pour filles. Par son influence sur le style graphique des mangas des années 1950, Tezuka a surtout généralisé le phénomène.
La troisième caractéristique du manga est moins perceptible car elle ressort de la narration et de la mise en page. Pourtant, il s’agit là d’une différence fondamentale avec la bande dessinée franco-belge et le comics. Il y a certes le sens de lecture de la droite vers la gauche mais c’est surtout l’agencement des cases et le rythme de l’action qui sont très différents entre ces trois pays de bandes dessinées. Le rythme de lecture dépend, pour commencer, du nombre de cases par planche. Dans le manga, ce nombre est généralement compris entre quatre et six sur deux ou trois bandes de deux cases. Bien entendu, pour créer des « pages mémorables » ou créer une mise en situation, il est possible de descendre à deux ou trois cases et de jouer sur la notion d’ellipse. Les bandes sont aussi plus ou moins éclatées, surtout dans le shôjo manga, notamment pour donner du dynamisme à la composition, et donc à la narration. Cela permet aussi de retranscrire des émotions comme la confusion. De plus, les chapitres sont courts : 16 pages pour les hebdomadaires, 30 à 60 pour les autres rythmes de prépublication. La construction en feuilleton (que l’on retrouve aussi dans les comics) est liée à cette prépublication en chapitre des mangas.
Les dôjin et le monde du manga « amateur »
Il est possible de faire du manga en dehors des maisons d’éditions déjà installées. Il existe un marché du manga « amateur » qui est devenu suffisamment important pour permettre d’en vivre. Les dojinshi sont apparus dans les années 1950 dans le cadre des clubs mangas qui existent notamment dans de nombreux lycées. Des « cercles » se forment, c’est-à-dire des groupes de personnes travaillant sur un même projet. Ces cercles sont sortis petit à petit du monde éducatif pour exister plus ou moins formellement en dehors, tout en se « professionnalisant ». Les mangas auto publiés sont généralement des one-shots (histoires auto conclusives) de quelques dizaines de pages racontant une histoire qui peut être la parodie d’une série à succès, ou être un récit original.
La vente de ces ouvrages se fait par Internet et surtout par le biais des conventions. Il existe même des anthologie publiant du dôjin. La plus importante convention est le Comiket (comic market) qui se déroule deux fois l’an au au Tokyo Big Sight. On peut en avoir un petit aperçu en France en allant à Japon Expo, dans l’espace fanzine. Mais pour le Comiket, il faut imaginer un espace fanzine de plus de 30 000 stands (composés d’une simple table) accueillant plus de 500 000 visiteurs en trois jours. Il existe d’autres conventions au Japon, plus petites, comme le Comitia à Tokyon plus accès sur les créations originales où des éditeurs francophones comme Ki-oon ont l’habitude de prospecter, à la recherche de talents encore inconnus des éditeurs japonais. Il y a aussi le Gataket à Niigata, pour donner un autre exemple. Depuis quelques années, avec le développement des plateformes de lecture en ligne, de plus en plus de dôjin y sont proposés. Une de ces plateformes est pixiv. Cela permet aux dojinshika de se faire connaître et, éventuellement, de passer professionnel·le·s, soit dans des magazines soit au format papier, soit en ligne.
En France, le phénomène existe aussi, de bien moindre importance, comme on peut le voir en allant dans la partie dédiée aux fanzines de conventions comme Japan Expo. Néanmoins, pour les passionné·e·s, c’est une excellente façon de découvrir le monde de la création et de l’édition, puis de se faire connaître.
Quatrième partie
Quand un manga (papier) rencontre un certain succès, il est souvent adapté en animé qui peut faire une ou deux saisons (ou plus si l’audience est au rendez-vous). Cette adaptation est importante pour les auteurs comme pour les éditeurs du manga originel car, outre des droits d’auteurs, la diffusion à la télévision accroit la notoriété donc l’audience du titre et amplifie ses ventes. C’est un phénomène qu’on ne rencontre pas qu’au Japon. En Occident, c’est la même chose : une série qui passe à la télévision (même par Internet) a de très grandes chances de mieux se vendre sous la forme de livre. Les plus gros succès commerciaux ont droit à une déclinaison cinématographique (bénéficiant donc d’un budget nettement plus important). Cette adaptation qui est diffusée dans les salles de cinéma est le plus souvent sous la forme d’un film d’animation, mais peut être aussi un fil en prise de vues réelles, avec de véritables acteurs et actrices. Le film d’animation peut être aussi produit uniquement pour une diffusion à la télévision (on parle alors d’OAV). L’adaptation peut aussi se faire sous la forme d’une série TV en prises de vues réelles avec de véritables acteurs et actrices. On parle alors de drama.
Une autre déclinaison des mangas qui connaît un succès certain est la figurine. En Occident, on aime beaucoup les figurines, il en est de même au Japon, ce qui fait le bonheur des magasins spécialisés, les marges étant bien meilleures que sur le livre. Elles ont tendance à être plus petites, moins travaillées et surtout moins cher au Japon qu’en France. Il s’agit dans l’exemple donné ici d’une figurine de Sailor Moon, mais il en existe des centaines et des centaines d’autres, issues de séries comme One Piece, Dragon Ball, etc. Cependant, les produits dérivés sont bien plus variés que cela. Nous avons déjà parlé des dojinshi, un phénomène qui s’est développé dans les années 1970 dans les clubs manga des lycées japonais, mais ceux-ci ne débouchent pas sur des droits d’auteur, ce qui en fait une catégorie illégale mais tolérée.
Les séries à succès peuvent être aussi déclinées sous une forme purement littéraire, en romans appelés « light novel », c’est-à-dire proposant une littérature sans grande prétention autre que de distraire. Nous sommes là dans la pure industrie du divertissement. Il s’agit le plus souvent de spin-off, c’est-à-dire des histoires parallèles mettant en scène des personnages plus ou moins secondaires. Néanmoins, il existe des séries qui font le chemin inverse. Des light novels, créations originales ayant rencontré un certain succès public, sont adaptés en manga et même en animés. Il y a même des cas où les trois supports sont prévus dès l’origine afin d’être très présents sur les trois canaux en même temps, renforçant ainsi leur notoriété et leur exposition. Enfin, les plus grands succès commerciaux trouveront leur Graal en étant adapté en jeu vidéo. Deux des trois principaux fabricants de consoles de jeux vidéo étant japonais, un nombre important de mangas à succès ont eu droit à une adaptation. Bandai est un des éditeurs de référence, un des plus actifs dans le domaine. Dragon Ball, Naruto, One Piece, mais aussi Mobile Suit Gundam, JoJo’s Bizarre Adventure, la liste est longue des adaptations réussies en jeux vidéo, que ce soit sur les consoles Nintendo ou les différentes Playstation.
La liste des produits dérivés est réellement interminable. Ce peut être aussi des jouets ou des jeux de sociétés, des peluches ou des poupées, des goodies sous toutes les formes imaginables (agenda, trousses, cahiers, stylos, cartables, cartes téléphoniques ou de train, vêtements et chapellerie, maroquinerie). Il existe aussi des chaines de cafés comme le Gundam Cafe que l’on peut trouver dans les principales villes japonaises. Le centre commercial Diver City à Odaiba accueille même une reproduction d’une armure à l’échelle un depuis 2009 (le modèle a changé en 2017).
Cinquième partie
Nous allons maintenant parler du manfra, le manga à la française, et de montrer comment le manga peut influencer les auteur·e·s qui préfère s’exprimer autrement que sous la forme d’une BD cartonnée couleur. Si cela peut ressemble à du manga, ça peut s’en éloigner
Qu’est-ce le manfra ?
Pour simplifier, le manfra est du manga réalisé par des francophones qui rêvent de faire de la bande dessinée à la façon des Japonais. Le terme n’est pas encore « officiel ». Cependant, il se diffuse de plus en plus dans la communauté, même s’il est rejeté par certains acteurs du genre comme Moonkey qui préfère le terme de « manga français ». Nous avons vu les principales caractéristiques du manga dans la première partie du présent dossier. En les appliquant au manfra, cela donne un ouvrage en N&B avec une pagination importante (au moins 160 pages) édité au format poche ou semi-poche (entre A5/B5 et A6/B6). La présence d’une jaquette est indispensable pour beaucoup, même si cela n’est pas obligatoire. Le sens de lecture « à la japonaise » dépend beaucoup du choix des auteur·e·s. Néanmoins, il est illusoire de publier en sens de lecture japonais en espérant une publication au Japon.
Bien entendu, un graphisme plus ou moins copié des mangas shônen ou des shôjo grand public est inévitable (alors que le manga propose une très grande diversité graphique). C’est ainsi que nous rencontrons surtout un dessin assez stylisé et plutôt rond que j’appelle semi-réaliste néoténique (avec des – plus ou moins – grands yeux) ou alors comique de type SD (Super Déformé). La narration, grâce à la pagination importante de l’ouvrage, est aussi d’inspiration manga, c’est-à-dire avec peu d’ellipses et la présence régulière d’enchainements de point de vue à point de vue (d’après l’analyse de Scott Mc Cloud exposée dans L’Art invisible). Il faut aussi une volonté de l’auteur·e et de l’éditeur de faire du manfra. Car il faut une édition professionnelle diffusée en librairie spécialisée ou en vente en ligne dans ma définition, sinon, on fait du fanzinat. Un certain nombre de petits éditeurs se sont créés au fil du temps pour pouvoir commercialiser sous forme physique le travail de diverses auteur·e·s. E.D Édition en est un bon exemple, même s’il semble ne pas avoir survécu à une distribution par Hachette (un diffuseur/distributeur plus petit aurait été une bien meilleure idée).
La bande dessinée hybride
L’influence du manga sur la bande dessinée franco-belge ne s’est pas limitée au manfra. Elle peut aussi se retrouver dans la bande plus grand public, du fait d’un dessin ou d’une narration manifestement sous influence. Une des premières œuvres françaises manifestement hybrides est L’Immeuble d’en face de Vanyda (La boite à bulles).
Afin d’être un peu plus concret, voici deux comparaisons entre du manga (à gauche), du manfra (au centre) et de la bande dessinée hybride (à droite). Bien entendu, ces classification peuvent sembler un peu artificielles ou discutables, notamment dans un domaine où les exemple et les contre-exemples abondent. Il surtout faut garder à l’esprit que ces distinctions ne doivent être en aucun cas un frein à la curiosité ou au rejet de telle ou telle œuvre parce qu’elle ne serait pas « canonique ». Trop de lectrices et de lecteurs rejettent le manfra car ce n’est pas du « vrai manga » (même si c’est de moins en moins vrai), tout comme de trop nombreux fan de BD franco-belge rejettent les séries où les influences asiatiques sont trop manifestes et restent nostalgiques des années 1950-1970. Toutes sont des bandes dessinées qui peuvent plaire, même si les plus sévères et blasés d’entre nous estiment que la Loi de Sturgeon s’appliquent dans tous les cas… tout en sachant ne pas ériger de barrières et se limiter à tel ou tel genre.
Pour terminer cette partie consacrée au manfra, essayons de réaliser une petite analyse avec Animus d’Antoine Revoy (IMHO). Le présent blog propose par ailleurs une chronique sur ce titre. Comme il y est écrit, l’auteur est un français qui a vécu au Japon plusieurs années et qui est installé aux USA depuis pas mal de temps. Ses influences BD sont donc multiples mais le manga est ici prédominant. Cette séquence de trois planches pose les enjeux dramatiques : la disparition inexpliquée d’enfants dans un quartier de la ville de Tokyo malgré la mobilisation de la police. Ces trois pages sont typiques de la bande japonaise : à chaque fois la première case est une scène d’ensemble, ce qui permet de définir puis de rappeler l’unité de lieu (un commissariat). Ensuite, Antoine Revoy multiplie les points de vue afin de dynamiser une scène qui serait autrement bien statique. Les multiples gros plans servent aussi à dramatiser la séquence et susciter l’émotion. La pagination importante permet de consacrer autant de cases juste pour exposer une situation, là où des récitatifs et des dialogues plus importants auraient été nécessaires dans le cadre d’un récit en 48 pages. Les treize cases se seraient alors retrouvées au nombre d’une dizaine sur une seule page de quatre bandes et de nombreux gros plans auraient sauté. Le dessin rappelle celui de Katsuhiro Otomo en utilisant un style réaliste stylisé et une épaisseur de trait assez uniforme. La suppression des décors dans la quasi totalité des cases n’est pas l’apanage du manga (Gotlib était célèbre pour cela) mais la bande dessinée japonaise, notamment le shôjo manga, s’en est fait une spécialité. Les yeux sont, par contre, dessinés de façon à rendre (et même à grossir) l’effet de pli épicanthal afin de « japoniser » les personnages.
Le webtoon
Il y a quelques années, il s’est développé en Corée du Sud une nouvelle forme de bande dessinée destinée à être lue sur des écrans et non pas dans un magazine papier ou dans un ouvrage relié. Du coup, la création est entièrement numérique alors que beaucoup de mangaka au Japon sont restés assez traditionnels dans leur façon de faire. Les webtoons sont apparus en 2003-2004 et ont connu de plus en plus de succès au fil du temps, notamment grâce à l’amélioration des écrans des téléphones portables. Les webtoons peuvent être payants ou gratuits. Généralement, les premiers chapitres sont gratuits, tout comme le dernier chapitre mais il faut ensuite payer pour pouvoir lire toute la série. Le gouvernement Sud Coréen a beaucoup œuvré à la promotion du webtoon dans toute l’Asie et en Occident (avec une internationalisation vers les USA en 2014), souvent par le biais de stands lors des salons et festival, présentant sur des écrans les webtoons à succès. ils sont accessibles par le biais de sites dédiés ou d’applications pour téléphones portables.
Depuis quelques années, profitant de l’engouement pour l’industrie culturelle coréenne (Kpop, Kdrama, etc.), le webtoon connait un succès fulgurant et de nombreuses plateformes sont désormais disponibles dans de nombreux pays, soit créées par des éditeurs coréens, soit des éditeurs locaux. Un des soucis avec le webtoon est le rythme de production élevé exigé car un auteur ou une autrice doit produire environ une soixantaine de cases par semaine, soit l’équivalent d’une dizaine de pages. Si vous devez tout faire, c’est rapidement intenable. Cela oblige à une standardisation du dessin et des couleurs. Une fois que la série a suffisamment de succès, il est alors possible de faire appel à des assistant·e·s, notamment pour faire la mise en couleur.
La grande différence avec la bande dessinée papier, c’est le sens de lecture : il est vertical au lieu d’être horizontal. L’autre grande différence avec le manga, c’est la couleur. Il n’y a plus de cases à proprement parler car le défilement est prévu de se faire à la verticale avec des transitions, ce qui est facilité par le fait que les images sont la plupart du temps en couleur, même s’il existe des webtoons en N&B. Pourtant, le papier résiste au numérique. En francophonie, les webtoons qui rencontrent le plus de succès sont proposés au format livre, eux aussi en couleur (ce qui impacte grandement leur prix). Cependant, le sens de lecture n’est pas le même, ce qui oblige à un remontage des cases afin de les faire passer dans un sens vertical à un sens horizontal au sein d’une page. Solo Leveling est un excellent exemple de ce remontage.
Dernière partie
Si la grande majorité des auteur·e·s de manfra sont plus ou moins autodidactes ou viennent de la bande dessinée franco-belge, il y en a (peu) qui ont fait des écoles spécialisées ou des écoles d’art. Ces dernières sont d’ailleurs à privilégier tant la diversité de leurs formations permet d’acquérir de nombreuses techniques et connaissances en art plastique en plus du dessin. En Belgique, les plus connues sont l’Institut Saint-Luc de Bruxelles (par laquelle de nombreux auteurs de BD sont passés) ainsi que l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (mais la bande dessinée n’y est pas enseignée). En France, l’École des Gobelins est la voie royale grâce à un enseignement d’une très grande valeur (toutefois l’animation et le jeu vidéo sont privilégiés à la bande dessinée).
Cependant, il y a de nombreuses écoles de qualité en province, telles que l’EESI à Angoulême / Poitiers, l’École Émile Cohl à Lyon, ainsi que L’Iconograf à Strasbourg, la Haute école des Arts du Rhin à Mulhouse / Strasbourg ou l’École Pivaut à Nantes / Rennes, l’EIMA à Toulouse. Cette liste n’est pas exhaustive, bien entendu. De plus, il existe des écoles privées spécialisées dans l’apprentissage du manga. Il y a par exemple Human Academy à Angoulême. Un éditeur a même fondé sa propre école : l’Académie de Bande Dessinée DELCOURT.
Il y a environ cinq années de là, je me suis mis à écouter des podcasts, principalement en voiture lors de mes déplacements en province. Certes, il m’était arrivé d’en écouter à telle ou telle occasion, mais pas de façon systématique. Voici une petite revue des émissions audio qui m’ont le plus intéressé. France Culture et France Inter sont de grands pourvoyeurs. Voici un petit retour sur les podcasts m’ayant le plus intéressés.
Qu’est-ce que c’est ?
Conçu au début des années 2000, popularisé par Apple et son iPod, le podcast est un enregistrement audio que l’on peut écouter à la demande, généralement gratuitement. Il existe deux types de podcasts au niveau du contenu : ceux qui reprennent des émissions radiophoniques et ceux dits natifs, c’est-à-dire créés spécialement pour être diffusés sur Internet. Au niveau de la forme, si au début leur diffusion se faisait uniquement par flux RSS, elle se fait aussi (et surtout maintenant) par le biais de plateformes, souvent fermées et en streaming obligeant à utiliser une appli dédiée. Peu sont directement téléchargeables. Néanmoins, au fil du temps, j’en suis arrivé à écouter une cinquantaine, de façon plus ou (généralement) moins assidue.
Pour ma part, je n’écoute mes podcasts (qui doivent avoir une durée d’au moins une demi-heure) que sous forme de fichiers (MP3, MP4 ou WAV) sur l’autoradio de mon véhicule. Heureusement, Firefox avec sa fonctionnalité Informations sur la page (onglet Média), me permet de contourner généralement l’impossibilité de téléchargement imposé par la majeure partie des plateformes de diffusion. J’ai ainsi récupéré, à fin octobre 2025, 40 Go totalisant presque 800 fichiers. Cependant, le tout premier podcast écouté en voiture date de 2016, sur les conseils et avec a-yin sur le chemin du festival Quai des bulles. Il s’agit de Mangacast N°37 : Shôjo, qui es-tu ? avec Bruno Pham en invité, que je devais absolument écouter d’après elle.
Les débuts (2021-2022)
Pour aider à passer le temps pendant les longues heures de route, j’ai décidé d’écouter autre chose que de la musique ou la radio de l’autoroute. En effet, devoir écouter des personnes permet de garder une certaine attention et donc de rester vigilent.
Les Couilles sur la table et Kiffe ta race
Sur un certain conseil, je me suis intéressé en parallèle à deux podcasts militants produits par Binge Audio (actuellement en redressement judiciaire), l’un sur le féminisme, l’autre sur le racisme. Au bout d’un an, je me suis lassé des Couilles sur la table, trouvant que les sujets commençaient à tourner en rond et surtout étant de plus en plus agacé par le ton et l’agressivité de Victoire Tuaillon. Celle-ci étant partie depuis pas mal de temps, il faudrait que je m’y intéresse à nouveau. Je garde d’un excellent souvenir de l’épisode Séducteurs professionnels (et de son bonus) grâce son invitée, la sociologue Juliette Roguet, écouté lors d’une tentative en 2023 (vite écourtée) de me ré-intéresser au podcast.
J’ai abandonné Kiffe ta race plus rapidement, malgré tout ma sympathie envers Rokhaya Diallo et Grace Ly, trouvant que ça tournait en rond et j’étais surtout à fond sur une certaine émission de France Inter. (voir ci-dessous) Le podcast s’étant achevé fin 2023, il faudrait que je complète mes téléchargements (j’ai un tiers des émissions) avant qu’ils disparaissent dans les limbes d’Internet, et surtout que je les écoute. Ma tentative de retour en 2023 ayant tourné court à cause d’un épisode sans intérêt et la fainéantise de donner une autre chance à la série. À l’époque, j’avais particulièrement apprécié On ne naît pas Blanc·he, on le devient avec Lilian Thuram.
Rendez-vous avec X
Cette émission radiophonique de Patrick Pesnot consacrée à l’Histoire secrète, celle des espions et des coups tordus étatiques, a été diffusée entre 1997 et 2015. Elle est disponible en podcast sur deux sites, un perso (celui où j’ai récupéré les fichiers) et celui de France Inter. Ayant eu l’occasion d’entendre quelques rediffusions de l’été 2021, je me suis mis à télécharger l’ensemble des épisodes jusqu’à fin 2023. J’ai ainsi plus de 380 fichiers, ce qui représente dans les 240 heures d’écoute. Plusieurs produits dérivés (livres, disques, BD) sont sortis. J’ai eu l’occasion de lire L’Affaire Pileckiparu en 2020 chez Glénat, et c’était plutôt pas mal (certainement grâce au scénariste Aurélien Ducoudray dont j’apprécie le travail).
La diversification de 2023
Tout en continuant d’écouter Rendez-vous avec X, j’ai commencé à chercher d’autres émissions. Suivant quelques conseils (par exemple ceux concernant l’Histoire par Natth sur le discord de Mangaverse, ou des liens postés sur le forum de BDGest) ou par trouvailles personnelles, j’ai diversifié mes sources, picorant ici ou là en fonction des sujets. Par exemple, c’est ainsi que j’ai écouté quelques épisodes de Passion Médiévistes, mais la quantité importante de propositions, la plupart peu parlantes à quelqu’un de peu impliqué par le sujet, ont fait que je n’ai pas persévéré. Il en est un peu de même avec Bunko! mais là, c’est surtout que je m’estime (à tort) « trop » connaisseur du sujet. J’ai aussi commencé à écouter en fonction de leur thème des podcasts de France Culture, comme Mauvais genre ou Toute une vie. Il y a trois podcasts qui m’ont tout particulièrement plu à cette époque et que je suis toujours.
Aventures Fiction
Consacré aux super-héros issus des comic books, le site de Xavier Fournier est HS depuis de nombreuses semaines à cause de la médiocrité de son hébergeur. Pour accéder à l’excellente série de podcasts Aventures Fiction, il faut passer par un de ses diffuseurs. Pour ma part, je passe par Apple Podcast car je peux télécharger les épisodes. Xavier Fournier est un spécialiste de la bande dessinée américaine grand public, notamment celle des super-héros DC et Marvel. La série Aventures Fiction (qui fait référence à une revue BD de l’éditeur Artima / Arédit parue entre 1958 et 1978) est, malgré mon peu d’intérêt pour les comics, surtout de super moule-burnes (comme je les appelle), particulièrement intéressante à écouter grâce à l’aisance et l’érudition de son auteur. Dommage qu’il n’y ait pas plus souvent de nouveaux épisodes mais le travail demandé est titanesque et peu rémunérateur pour un auteur indépendant. La série La folle histoire du DCU à l’écran est particulièrement intéressante.
Chaleur humaine
Je suis très fan de Chaleur humaine grâce à son animateur, Nabil Wakim que je trouve excellent. Par contre, j’ai un peu décroché en 2024 du fait de la présence envahissante des invité·e·s venant du monde politique. Merci, mais je n’ai pas envie d’avaler leur « soupe propagandiste » : je veux entendre des personnes expertes dans le sujet abordé, surtout que l’écologie et moi, ça fait deux. La plupart des podcasts sont vraiment instructifs et je ressortirai Comment bien expliquer les enjeux du climat ? (avec Jean-Marc Jancovici) du fait de son invité dont je suis très fan (même si je n’ai pas accroché à sa BD réalisée avec Christophe Blain, bédéiste que j’apprécie pourtant).
Le Cours de l’Histoire
Le Cours de l’histoire , en plus d’être caractérisé par une grande diversité de propositions politiques et sociales, bien conduites par Xavier Mauduit, est un podcast qui segmente souvent ses sujets sur plusieurs émissions, ce qui permet de les approfondir. De ce fait, je me retrouve à avoir pas mal de fichiers dans le dossier concerné. Alors, certes, cela ne représente pas grand-chose sur le nombre d’épisodes disponibles, l’émission hebdomadaire existant depuis plus de six ans. Le thème qui m’a le plus marqué jusqu’ici est Sorcières, sorciers, une histoire sans philtre, mais j’aurai pu en relever d’autres, comme Expositions universelles, le monde en spectacle.
Depuis 2024…
Ayant moins d’autoroute à faire, j’ai diminué ma consommation de podcast, notamment à partir du mois de juin 2024. J’ai aussi diversifié mes sources, peut-être pour éviter la lassitude. En général, les podcasts liés à la BD ne m’intéressent pas, à moins qu’il y ait une personne invitée que je connaisse et qui me plaise. C’est notamment le cas avec Arigato Podcast pour, par exemple, l’excellente émission avec Jean-Paul Jennequin ou First Print, lorsque Xavier Guilbert intervient. En effet, l’actualité des sorties ne m’intéresse absolument pas, je ne fais pas une tournée des librairies du quartier Saint Michel tous les samedi pour rien. Je peux tout autant m’intéresser à certains podcasts d’Asiattitude qu’à ceux de Zoom Zoom Zen (France Inter). Cependant, ce sont surtout des émissions de France Culture que j’écoute assidument depuis plusieurs mois, rattrapant ainsi un retard certain.
La Série Documentaire
« Documenter toutes les expériences de la vie, des cultures et des savoirs. Chaque semaine, un grand thème en quatre épisodes, autonomes et complémentaires », telle est la présentation que nous en fait France Culture. Ajoutons que ce ne sont jamais les mêmes personnes qui réalisent ces documentaires, ce qui permet une très grande variété. C’est le podcast que je suis le plus actuellement tant ce qu’il propose (des récits et non des analyses) m’enthousiasme : je conseille d’écouter les quatre formidables épisodes de Qui est “l’Arabe du coin” ? et les quatre tout aussi passionnants de Musées, la réinvention permanente ou les quatre instructifs podcasts d’Au-delà du clitoris. J’en ai beaucoup à découvrir, ayant une dizaine d’années de retard à combler (et ce, même si tout ne m’intéresse pas).
Sans oser le demander
À la différence de manu_fred, je manque de curiosité intellectuelle et de culture générale, c’est pourquoi Géraldine Mosna-Savoye me permettait de corriger ce petit défaut à grand coups de thématiques variées qui me parlent. Malheureusement, c’est terminé depuis l’été 2023 mais j’ai encore de quoi écouter. Il faut dire que lorsqu’on consacre un épisode à Rumiko Takahashi, on ne peut être que quelqu’un de bien. L’émission Pourquoi prendre des photos au musée ? m’a tout particulièrement interpellé et intéressé. Par contre, Le Souffle de la pensée me semble un peu trop philosophique à mon goût, même si je trouverai bien une ou deux « bricoles » à écouter.
La compagnie des œuvres
Encore une émission arrêtée (en 2021). Elle s’intéressait aux artistes et à leur œuvre mais aussi à certains mouvements artistiques. Ce sont surtout les épisodes concernant la peinture qui attirent mon attention, je dois avouer. Par exemple, j’ai trouvé la série Claude Monet et l’impressionnisme passionnante à écouter. J’ai beaucoup de retard, là aussi. Par exemple, il y a celles sur Picasso, Anaïs Nin (j’ai beaucoup aimé la BD de Léonie Bishoff), Chaplin, mais aussi sur l’Art nouveau, etc. qui m’attendent.
Conclusion
J’aurai pu parler aussi du podcast (malheureusement en pause) des Éditions du Commun, Les mécaniques du livre, ainsi que de celui que nous propose l’émission militante « d’actualité sociale, politique et culturelle » Les Oreilles loin du front ou du très grand public C’est plus que de la SF (alors que je ne suis pas fan de ce que fait Lloyd Cherry). Il était inutile de rendre encore plus interminable ce billet, il y a déjà de quoi écouter avec toutes ces propositions et de se faire une idée des différentes thématiques qui trouvent de l’intérêt à mes oreilles. Quand je pense que j’ai encore les podcasts d’Arte Radio à découvrir (je regarde régulièrement les documentaires d’Arte à la télévision), sans oublier tous ceux que je connais pas encore, j’ai encore des années d’écoute devant moi, même en écartant ceux (si fréquents dans le monde du manga ou du jeu) où ça rigole trop entre copains et copines. Je veux du sérieux, de l’érudit et de l’intéressant.
Édouard Cour nous revient plus de trois années après une œuvre formidable, ReV, parue en 2022 chez Glénat. Avec Soli Deo Gloria, comme avec chacune de ses nouvelles créations, l’auteur nous propose une bande dessinée très différente graphiquement des précédentes. Le thème est lui aussi une nouveauté pour le bédéiste. Il met ici en images l’histoire d’un autre, Jean-Christophe Deveney, scénariste et enseignant de son état. Cette fois, le récit se place dans un XVIIIe siècle plein de bruit et de fureur, mais aussi de musique chrétienne. En effet, nous suivons deux jumeaux, Hans et Helma, de leur naissance dans une campagne arriérée située dans le Saint-Empire Germanique à la magnificence de Rome en passant par Venise, Amsterdam et Leipzig. Les aléas de la vie et leur amour de la musique, qu’elle soit instrumentale ou vocale, vont leur permettre de dépasser leur condition paysanne miséreuse et connaître les ors de la haute société européenne. Leurs talents et leur soif d’apprendre sont tels qu’ils réussissent à se faire remarquer à plusieurs reprises par de puissants personnages et, ainsi, à parfaire leur art. Néanmoins, attention à rester humble et à ne pas se croire supérieur à ce que l’on est réellement sous peine de chuter plus bas que terre.
Soli Deo Gloria reprend de nombreux codes du roman d’apprentissage, genre apparu en Allemagne au XVIIIe siècle (tiens, tiens…) au point d’en être une caricature en cochant tous les points abordés dans la fiche Wikipédia. C’est d’ailleurs là la faiblesse de cet ouvrage : un scénario un peu trop convenu et manquant d’originalité, de surprise, quoique très bien documenté du point de vue historique. Le nom des personnages historiques et des villes sont changés pour marquer l’aspect fictionnel de l’histoire sans que cela apporte quoique ce soit au récit. Pourtant, Jean-Christophe Deveney n’est pas un débutant dans cet exercice, comptant plusieurs dizaines de créations. L’auteur de la présente chronique a d’ailleurs eu l’occasion d’en lire quelques-unes mais seule l’œuvre collective Héro(ïne)s : la représentation féminine en bande-dessinée a réellement trouvé grâce à ses yeux avant Soli Deo Gloria. Heureusement, le titre est porté par le graphisme somptueux d’Édouard Cour. Utilisant à nouveau un noir et blanc agrémenté de touches de couleur signifiantes, l’artiste change à nouveau de registre, plus réaliste et s’essaye à un mélange de techniques de dessin sur papier et d’ajouts numériques. Le résultat est bluffant, magnifique, une fois de plus. L’exposition-vente à la galerie Achetez de l’Art de certaines des planches originales permet d’ailleurs de mieux apprécier ce travail en comparant celles-ci aux pages imprimées.
Dans une vidéo promotionnelle de Dupuis, Édouard Cour explique à un moment sa volonté de revenir au dessin en noir et blanc, ainsi que de donner un certain effet à ses planches en posant (peignant) numériquement deux types de trames, une foncée et une plus claire. Le résultat est plus que concluant, mais malheureusement, il ne ressort correctement que sur la version imprimée de l’œuvre, les trames ne supportant pas les réductions imposées par une lecture sur un écran, que ça soit celui d’une liseuse / tablette ou d’un ordinateur. Il y a ainsi de la matière, du volume dans les décors. Les sons sont représentés par des traits acérés qui forment des mots, si on regarde bien. Ce sont de véritables onomatopées, mais plus visuelles que lisibles. Les touches de couleurs sont principalement utilisées pour la musique et le procédé fonctionne bien. Ce n’est pas la première fois qu’Édouard Cour se frotte à la représentation visuelle de la musique. Il y a quelques années, il avait été chargé de créer des représentations visuelles pour le Centre de Documentation de la Musique Contemporaine.
Il s’agit d’une des sorties les plus marquantes de l’année, en tout cas sur le plan visuel, avec un sujet pouvant toucher un public bien plus large que celui des lectrices et lecteurs de bandes dessinées. Par ailleurs, une lecture avec, en fond sonore, une playlist de musiques baroques, à commencer par les titres les plus connus de Vivaldi et de Bach, est conseillée.
Auteurs : Jean-Christophe Deveney & Édouard Cour Éditeur : Dupuis Prix : 30 € Format : 24 x 32 cm, 280 pages Couverture : Cartonnée ISBN : 9791034768974 Date de sortie : Octobre 2025
Pratiquement six ans après la sortie de son vingt-troisième et dernier tome, la série mythique Dorohodoro revient dans une « Chaos Edition », regroupant à chaque sortie deux volumes de la parution originale. Le quatrième opus est attendu pour début octobre. Voilà l’occasion de revenir sur un titre qui a eu du mal à trouver son public pendant des années avant de devenir culte auprès du lectorat francophone.
Deux mondes se côtoient : Il y a Hole, où (sur)vivent des humains, dans une société en pleine décomposition. De plus, ceux-ci sont victimes de mages qui vivent dans une autre dimension et qui viennent s’exercer et s’amuser à les transformer en diverses choses, selon leur talent magique. Leur pouvoir résulte de leur personnalité et le résultat est souvent imprévisible. Certains peuvent vous transformer en champignon, d’autre vous découper en rondelles sans vous tuer, d’autre encore peuvent vous faire fondre ou vous transformer en saurien, en insecte, etc. Des mages, aux pouvoirs très recherchés, peuvent vous soigner et vous retaper physiquement quel que soit l’importance de vos blessures. Il se dit même que certains mages peuvent ressusciter les morts ou maitriser le temps…
L’histoire commence à Hole où Caïman, un humain (?) amnésique dont la tête est celle d’un lézard, cherche à tuer tous les mages qu’il rencontre, mais seulement après avoir vérifié qu’il ne s’agissait pas de celui qui l’a transformé. Il est assisté dans sa quête par Nikaido, la tenancière d’un restaurant de gyozas et redoutable combattante. Cependant, à force de tuer des mages alors que ceux-ci ont plus l’habitude d’être des chasseurs que des proies, notre duo attire sur lui l’attention d’En, le dirigeant (de fait) du monde des mages. Il s’agit d’un mage surpuissant qui bénéficie de l’aide de Chidamura, le premier et le plus puissant des diables. Ces derniers sont des anciens mages qui ont réussi à s’élever à un niveau supérieur après un entrainement très sélectif et réservé aux meilleurs.
Deux des plus puissants acolytes d’En se lancent à la recherche de Caïman et de Nikaido : Shin (un demi-humain) et Noï. Ce sont deux puissants combattants, aux pouvoirs magiques redoutables. L’affaire devrait être donc rondement menée… sauf que l’homme-lézard est insensible à la magie. Celle-ci s’exprime sous forme de fumée, une fumée de poudre noire que peuvent produire tous les mages, la quantité dépendant de leur puissance magique. Il se révèle assez rapidement que Caïman semble lié à une secte, celle des « yeux en croix » qui regroupe des minables, ceux qui sont incapables de produire leur propre fumée. Il y a de nombreuses années, En a déjà eu affaire à leur chef et ne s’en est sorti que de justesse. Il pensait s’en être débarrassé. Il faut dire que dans un monde où la mort est rarement permanente, aucune victoire ne peut être définitive !
C’est avec un plaisir sans limite que l’on se (re)plonge dans l’univers original, nonsensique et gore mis en place dans Dorohedoro. Cela grâce à la présence de personnages peu manichéens, à de nombreux dialogues décalés proposant un humour teinté d’autodérision, et une histoire se déroulant deux mondes particulièrement bien étudiés. Le tout donne une atmosphère très particulière accentuée par le graphisme immédiatement reconnaissable de Q-Hayashida, l’autrice. Il est à la fois lâché et très sombre. L’influence de l’artiste suisse H.R. Giger et de ses peintures biomécaniques est manifeste, mais aussi de l’œuvre de l’artiste japonais Kenji Yanobe célèbre pour ses sculptures issues d’un univers dystopique. La narration reste un modèle de rythme et de clarté malgré les multiples trames scénaristiques. Grâce à des analepses toujours bien gérées, on apprend petit à petit le passé de certains personnages, même si les informations sont souvent données avec parcimonie.
Il ne faut pas compter sur le All ★ Star Guide Book (sorti à l’occasion de la nouvelle édition de Dorohedoro) pour en savoir beaucoup plus, surtout à propos des personnages plus que secondaires. Nous avons bien droit sur près de la moitié de l’ouvrage à une fiche sur quasiment toutes les personnes et « bestioles » rencontrées tout au long du récit, mais ça ne présente pratiquement aucun intérêt. L’autre grosse moitié consiste en de courtes histoires. Si les deux premières (chacune faisant environ 25 pages) ne sont pas inintéressantes, le reste est totalement dispensable. Ce reste consiste en de courtes saynètes de trois ou quatre planches en couleurs, ou plus exactement qui mélangent plusieurs bichromies. À la fin, on se retrouve donc avec une soixantaine de pages sur les 220 qui valent le coup d’être lues. Même si le prix de ce guide book est très serré pour une fabrication très qualitative qui a dû demander beaucoup de travail de traduction et de mise en plage, voilà une sortie à réserver aux plus fans d’entre nous.
Pour en revenir à la Chaos Edition, chaque tome reprend donc deux volumes de la série originale, avec les pages couleurs, même lorsqu’elles sont intérieures. Le format est le même, mais les planches sont ici infiniment mieux reproduites car l’éditeur bénéficie cette fois du matériel japonais au lieu de devoir scanner la version japonaise. La traduction a été revue par Sylvain Chollet afin de lui donner plus de « pep’s ». Il s’était occupé de la version française durant les seize années de la première version. L’adaptation graphique de GB One a été entièrement refaite par Anne Demars, la lettreuse de Dorohedoro depuis 2008 : le gain est manifeste. Sur la jaquette, nous retrouvons l’effet « peau de serpent » des tous premiers tomes des années 2003-2004, sans embossage mais avec un vernis sélectif 3D. C’est donc une très belle édition qui nous est proposée, même si on apprécierait une couverture une peu moins souple. Ne boudons donc pas notre plaisir et remercions Iker Bilbao, le directeur éditorial de Soleil Manga de nous permettre de (re)découvrir un des meilleurs mangas actuellement disponibles en français.
Dans la continuité du billet Horizon Zero Dawn et ses MODs, voici un petit point sur ce qu’il est possible d’utiliser avec la version PC d’Horizon Forbidden West. Celle-ci est disponible depuis mars 2024, les premiers MODs apparaissant très rapidement sur NexusMods. Une petite année et demi plus tard, où en sommes-nous ?
Des débuts poussifs
Au début, il s’agit surtout de proposer des réglages Reshade pour changer le rendu 3D du jeu, ou des sauvegardes. Il y a certes une table de triche pour Cheat Engine mais rien de bien folichon, surtout que l’utilisation de ce dernier a tendance à bloquer les succès des jeux (dans le cas présent, je l’ignore, je ne l’ai pas essayé). Néanmoins, début avril, le premier MOD indispensable est disponible : il s’agit de Gameplay Tweaks and Cheat Menu. Moins riche que la version originelle conçue pour HZD, il y a les options qui vont bien pour jouer sereinement, même en difficulté ultra-difficile. Le mois d’avril est d’ailleurs assez riche en propositions ; un quart des MODs actuellement disponibles sont sortis durant cette période. Malheureusement, aucun n’est réellement intéressant, y compris ceux sortis les mois suivants. La plupart reposent sur Reshade, y compris AIO Outfit Reducer Mod qui permet d’enlever le haut de certaines armures et de dévoiler la poitrine d’Aloy. Cela consiste à rendre transparents certains shaders, mais cela ne fonctionne que si la modélisation de notre héroïne n’intègre pas de tenue. Les joueurs et joueuses obsédé·e·s par la nudité d’Aloy ne peuvent donc pas trouver cette solution satisfaisante. De même, les personnes voulant avoir de nouvelles tenues restent dans l’attente.
Quand la rétro-ingénierie finit par aboutir
Après des mois de calme, notamment sur le Discord Horizon Modding, un MOD sans intérêt mais pouvant servir de « preuve de concept » est mis en ligne fin mai 2025, soit plus d’un an après la sorte du jeu. Il est désormais possible d’importer ses réalisations dans le jeu. En effet, si les moddeurs avaient trouvé assez rapidement comment extraire modèles 3D et textures du jeu malgré les grandes différences entre le nouveau moteur Decima et l’ancien, ils ont été longtemps dans l’incapacité d’inclure leurs créations dans le jeu. C’est désormais chose faite. Comme nous pouvons nous en douter, très rapidement, des MODs sont arrivés pour déshabiller Aloy : entre fin juin et début juillet, deux moddeurs postent sur Nexusmods leur proposition. Aloy nude mod remplace trois armures tenakth en deux versions, avec ou sans peinture corporelle. Le résultat est tout à fait satisfaisant, il faut l’avouer. Après tout, étant donné que de nombreux personnages masculins sont torse nu avec leurs tétons bien apparent, pourquoi n’en serait-il pas de même pour Aloy ? 🙂
La sexualisation d’Aloy est bien plus poussée avec le MOD HC Aloy – Skimpy Outfits. Quoi qu’en dise son auteur, il a manifestement projeté ses fantasmes dans la réalisation du modèle 3D et n’a pas cherché à coller au plus près de l’originale. Les seins sont exagérément gonflés et font artificiels. L’utilisation d’une sorte de « string ficelle » était peut-être dispensable, surtout que les éléments d’armure sont bien fendus « comme il faut » devant et derrière. D’autres images illustrant cette vision sexualisée d’Aloy sont disponibles dans la galerie NSFW. Hornycopter (au moins, son pseudo ne ment pas) semble avoir la même fascination pour Lara Croft, une des autres grandes héroïnes de jeu vidéo. Dans un genre différent, il propose aussi un MOD modifiant le visage d’Aloy afin de ressembler un peu plus à l’actrice qui l’incarne. Les changements sont plutôt subtils dans ce cas, le menton étant un peu plus pointu et les joues légèrement moins rebondies. Il y a trois variantes, selon que l’on veut faire disparaitre ou pas des rougeurs inévitables lorsqu’on vit en pleine nature.
En fait, il existe deux types de MODs, ceux qui sont compatibles avec HFW Mod Manager et qui peuvent être combinés (s’ils ne modifient pas les mêmes caractéristiques) et ceux qui sont uniquement utilisable en solo car les fichiers modifiés sont déjà générés et il n’y a qu’à les copier au bon endroit. Ce sont ces derniers qui sont apparus en premier. HFW MM n’est pas simple à installer, ou plutôt, il faut installer Python et sa librairie PyQt5 pour qu’il fonctionne. Une chose importante à faire dans les deux cas : sauvegarder (juste après avoir installé le jeu) les fichiers streaming_graph.core et streaming_links.stream car il suffira de les recopier dans leur dossier d’origine pour remettre le jeu dans sa version initiale et installer d’autres MODs. Quoi qu’il en soit, l’utiliser en vaut la peine car cela permet de mixer, même s’il faut éviter les conflits qui peuvent donner des résultats étranges quand ce n’est pas un plantage pur et simple du jeu. Il commence à y avoir des tenues intéressantes, il y a même une nouvelle coupe de cheveux qui fait ressembler Aloy à Bêta.
La galerie NSFW
Étant donné les MODs auxquels je me suis le plus intéressé, il m’était impossible de ne pas capturer quelques scènes proposant de la nudité féminine. Bien entendu, la galerie n’est pas directement visible afin que celles et ceux qui ne sont pas intéressé·e·s ou désapprouvent ces images n’aient pas à les subir, appliquant ainsi l’avertissement Not Safe For Work.
En conclusion
Il va falloir ne pas être pressé pour avoir d’autres MODs intéressants car Nexusmod ne croule pas sous les propositions. Cela montre bien la différence d’engouement entre HFW et HZD, le premier épisode s’étant vendu nettement plus que le deuxième. Actuellement, les ventes totales de la franchise s’élèvent à plus de 38 millions d’exemplaires toutes versions confondues, y compris le remaster de HZD, Horizon Call of the Mountain (le jeu VR) et possiblement LEGO Horizon Adventures. En 2023, les ventes de HZD PS et PC représentait 24 millions de ventes. Sur Nexusmod, on est à un peu moins de 100 MODs pour HFW alors qu’il y en a plus de 250 pour HZD (et 16 pour HZD remaster). Reste à attendre le troisième opus mais il est bien possible que ça ne soit pas avant 2027 avec l’arrivée de la PS 6. Horizon Online est prévu pour cette année (mais là, je ne me sens pas réellement concerné).
Pour ma part, j’utilise actuellement Reshade pour ses shaders invisibles, Tweak & Cheat pour sa caméra libre (pas très pratique), les ajouts de ressources dans l’inventaire et le mode demi-dieux pour ne pas mourir trop souvent (plus tard, je m’amuserai à me téléporter ici ou là). J’ai installé pour les besoins de ce billet Mod Manager (et donc cessé d’utiliser Aloy Nude car non compatible). Cela m’a permis d’utiliser quatre MODs d’Hornycopter : Bodypaint pour enlever les peintures corporelles, HM Customizer pour changer légèrement le visage de « Cheveux de feu », Skimpy Outfit pour dénuder partiellement notre héroïne et aussi la variante la dénudant complètement. À cela, j’ai ajouté un autre MOD, Lighter Queen Deadeye (faisant partie de la suite Lighter Outfits for Aloy) pour voir sa compatibilité. J’ai testé aussi Guardian Armor Set mais il rentre malheureusement en conflit avec Skimpy Outfit (ce sont les mêmes tenues qui sont remplacées). En plus, Aloy avec des cheveux courts, j’y arrive pas 🙂
La première saison de la série télévisuelle MurderBot (connue en francophonie sous le nom Journal d’un AssaSynth) vient de s’achever sur Apple TV+. Alors, réussie ou non, cette adaptation de la première novella de Martha Wells ? Oui, sans conteste ! Voici donc l’avis de quelqu’un peu fan des images qui bougent, qu’elles soient en prise de vues réelles ou en animation.
Journal d’un AssaSynth, dont le titre original est The Murderbot Diaries, est une suite romanesque de science-fiction écrite par Martha Wells. En français, nous pouvons lire actuellement les quatre novellas constituant une sorte de premier cycle, celui qui est en cours d’adaptation télé (la saison deux a été annoncée et devrait être diffusée en 2026). Un deuxième cycle semble se dessiner avec deux romans, un relativement long et un assez court. Enfin, une novella indépendante vient approfondir les relations entre les deux personnages principaux que sont AssaSynth et la docteure Mensah (le récit se place entre les deux cycles). Quelques courtes nouvelles sont disponibles en VO, souvent publiées en ligne et lisibles gratuitement. Un nouveau titre (Platform Decay) est prévu pour le mois de mai 2026 aux États-Unis, qui devrait être la suite d’Effondrement système. J’ai eu l’occasion de donner mon avis dans un billet WordPress datant de 2021, inutile de redire ici tout le bien que je pense de l’œuvre. Concentrons-nous donc sur la série télévisuelle…
Une adaptation visuellement réussie
Les fans de la série littéraire se sont forcément forgé des images, ont leur conception visuelle des personnages, des lieux, du design des objets, etc. Certes, les illustrations de James Jones (les couvertures VO) ou de Tommy Arnold (qui a aussi été chargé du concept art pour la version télé) du côté américain, sans oublier Pierre Bourgerie (plusieurs couvertures VF) du côté français, ont influencé notre vision d’AsssaSynth mais uniquement en armure. C’est donc une excellente surprise de voir que les concepteurs de la série télé ont réussi à nous proposer un design auquel on peut adhérer. Plutôt sobre et fonctionnel, c’est une belle réussite, même si pour le dépaysement, on repassera. C’est crédible et c’est bien là le principal.
Le casting des actrices et acteurs est particulièrement réussi. Pas de beaux gosses bien blancs et virils, pas de jeunettes au physique apprêté, pour ne pas dire refait. Les personnages sont variés, plutôt âgés (ce sont des scientifiques réputés dans leur domaine); Surtout, tout le monde joue juste. Mention spéciale à l’actrice qui joue la Dr Mensah (Noma Dumezweni) et à l’acteur qui incarne Gurathin (David Dastmalchian). Les autres ne sont pas en reste, à commencer par celui qui personnifie MurderBot, la SecUnit séditieuse, (Alexander Skarsgård), en héros continuellement perdu, inquiet mais aussi désabusé et cynique.
Une adaptation fidèle
Les dix épisodes suivent plutôt scrupuleusement l’histoire de la première novella, même si les auteurs (les frères Weitz, Paul et Chris) prennent de plus en plus de liberté au fur et à mesure que le récit progresse. Ils proposent quelques changements destinés à rendre la série plus facile d’accès. La première différence est la réduction du nombre des scientifiques venus de Préservation : exit Overse (la compagne de Pin-Lee dans le livre) et Volescu (le chercheur qui accompagnait la docteure Bharadwaj lors de l’attaque par « Hostile »). Du coup, une sorte de ménage à trois est mis en place dans la série entre Pin-Lee, Arada et Ratthi, sans que ça devienne de la romance qui aurait été malvenue. Pour le reste, il n’y a pas de gros changements au niveau des rôles entre les deux versions même si le passé de Gurathin est ici une création originale.
Attention, des éléments de l’intrigue sont révélés dans le paragraphe en orange, vous pouvez donc le passer pour reprendre votre lecture un peu plus bas.
L’introduction d’un nouveau personnage vers le milieu de la série apporte une touche d’originalité bienvenue même si son acceptation par l’équipe de Préservation est peut-être un peu trop facile. En effet, cela permet de montrer à quel point AssaSynth peut être létal envers les humains. Cela montre aussi la candeur des personnes qu’il a décidé de protéger, coûte que coûte. De plus, tout le final est simplifié, même en suivant la trame romanesque. La fuite devant l’arrivée probable de DeltFall, le rôle de Mensah et l’intervention de Gurathin dans le lancement de la balise sont un peu trop condensés et pas toujours bien amenés. Il faut dire que le format court de la série (une vingtaine de minutes hors générique de début et de fin) ne permettait pas dans ce cas précis de montrer de façon dynamique un récit principalement basé sur les discussions et les réflexions d’AssaSynth. Néanmoins, cela se laisse regarder sans déplaisir. Cependant, la partie originale la plus ratée est bien la dramatisation à outrance de la destruction à venir de la SecUnit séditieuse par son propriétaire, la Compagnie. Cette destruction est arrêtée in extremis par Pin-Lee, de façon peu crédible. Cela permet toutefois de donner par la suite un rôle plus important et positif à Gurathin.
Quelques reproches, néanmoins
Après discussion avec une camarade qui n’a pas lu les livres, certains reproches peuvent être formulés concernant cette adaptation télévisuelle. C’est ainsi que nous pouvons relever les points suivants :
L’acteur jouant lMurderBot n’est pas vraiment androgyne, il est très masculin, ce qui semble en contradiction avec la façon dont les cyborgs de sécurités sont présentés. Il ne s’agit pas de SexBot, leur représentation aurait pu être plus « inhumaine ».
Le plus gros de l’humour est dû aux réactions de MurderBot, qui sont celles de la représentation qu’on se fait d’une personne autiste (difficulté de communication, décalage, non-respect des conventions sociales, cynisme). On aurait pu penser à quelque chose de plus détaché et différent des réactions humaines. Là, on dirait que c’est un « simple » négatif des réactions de la plupart de ses clients.
La façon dont la série fictive est régulièrement introduite est souvent assez « lourdingue », le comique de répétition ne fonctionne pas. Pire, elle n’apporte rien au récit. C’est surtout vrai avec l’épisode 8 où on perd 3’30 de la trame principale pour pas grand-chose, à part nous montrer à quel point Apogée et déclin de la Lune sanctuaire est kitch.
Les clients humains ont une espèce de candeur maladroite, ce qui est original. Cependant, il est difficile de comprendre quelle part de cette maladresse est liée à la culture de Préservation basée sur la tolérance, l’inclusion, la recherche de consensus, etc. C’est parfois désarçonnant, et peut même être assez ridicule de la part de scientifiques reconnus dans leur domaine, car cette candeur semble un peu surjouée.
Quoi qu’il en soit, voilà une adaptation qui se laisse regarder avec plaisir, qui est assez addictive, tout comme la novella dont elle est issue. Certes, il n’est pas possible d’avoir la profondeur des réflexions et des descriptions de la version littéraire mais le rythme est bien là, malgré quelques lenteurs, généralement causées par l’insertion de la série fictive. Il est regrettable que MurderBot ne soit pour l’instant uniquement accessible que sur Apple TV+ et il faut espérer une sortie prochaine en DVD et Blu-ray. La saison deux étant déjà annoncée, les frères Weitz ont révélé dans un entretien qu’ils allaient cette fois se baser sur les tomes 2 et 3. Cela fait sens tant ces deux novellas peuvent être combinées en une seule histoire. Rendez-vous est donc pris pour l’année prochaine !
Plus de trois années sont passées depuis mon dernier billet consacré à la bande dessinée asiatique au festival d’Angoulême, une période marquée par une nouvelle direction artistique. Alors que la programmation de la cinquante-troisième édition est en train de se mettre en place en pleine polémique concernant les très bonnes relations entre 9e Art+ et l’Association du Festival, il est temps de proposer un petit ajout à la série La Bande dessinée asiatique au festival d’Angoulême.
Les précédents billets
Pour rappel, voici les précédents billets sur le sujet :
L’édition 2021 n’ayant pas eu lieu en « présentiel » pour cause de COVID, et après une nouvelle réorganisation (ça changeait tous les ans à l’époque) de la direction artistique du festival après le départ (toujours regretté) en 2020 de Stéphane Beaujean, une certaine stabilité s’est installée en ce qui concerne la bande dessinée asiatique. En effet, Fausto Fasulo (aussi directeur des rédactions des magazines Mad Movies et ATOM) a pris le poste en 2021, après avoir été en 2019 et 2020 responsable des animations de l’espace Rencontre de Manga City. Cette continuité permet d’y maintenir une qualité certaine et il n’y a pas réellement de doute à ce sujet en ce qui concerne 2026.
Pour l’édition 2022, déplacée à un inhabituel mois de mars, Manga City bénéficie à nouveau d’un espace confortable, celui destiné à accueillir un ensemble immobilier et situé à côté de la médiathèque l’ALPHA. Cela permet d’avoir 1 500 m2 pour les stands et un bel espace de 500 m2 pour les rencontres et animations. Le programme de celles-ci, malgré l’absence de mangaka parmi les invité·e·s (il faut se contenter de la fille de Mizuki pour entendre parler japonais) sont d’ailleurs bien plus consistantes que celles de 2020 qui étaient totalement dénuées d’intérêt. Néanmoins, il n’en reste rien de particulièrement mémorable. Parmi les invitées asiatiques, notons la présence de Pam Pam Liu sur les stands d’IMHO et de Taïwan. Elle est une des cinq autrices venues avec la délégation taïwanaise pour cette édition du festival. Par ailleurs, Adoor Yeh et Doz Lin ne sont pas des inconnues à Angoulême car elles ont été en résidence à Maison des auteurs entre décembre 2020 et février 2021. Quand à Chen Pei-Hsiu, elle a été en résidence à la Maison de la BD de Blois, de mi-novembre 2020 à mi-février 2021.
Les expositions en rapport avec la bande dessinée asiatique sont au nombre de trois : la principale, consacrée à la carrière de Shigeru Mizuki, est située au Musée d’Angoulême. Elle connait un grand succès malgré la faible fréquentation générale de cette édition atypique. Cela s’explique notamment par la présence en nombre d’un public peu amateur de manga et souvent assez âgé (en plus de l’excellence de l’exposition en elle-même). Les deux autres expos trouvent place à l’Alpha. L’une met en avant Tatsuki Fujimoto et ses deux séries Fire Punch et Chainsaw Man, l’autre est orientée cinéma d’animation avec « L’Art de Inu-Oh » qui comprends plusieurs dessins de Tayou Matsumoto. Les deux sont sympathiques mais restent anecdotiques. Comme chaque année, le cycle des Conférences du Conservatoire (c’est le dernier mais on ne le sait pas encore) propose une conférence sur la place de plus en plus importante des femmes dans la création de mangas à destination d’un public adulte. Il s’agit de « Un souffle féminin dans le seinen manga » donnée par votre serviteur.
Notons aussi la présence au fond de la bulle de l’exposition Goldorak consacrée à l’ouvrage collectif éponyme publié par Kana fin 2021, prise d’assaut, notamment lors des séances de dédicaces. Par ailleurs, les éditeurs spécialisés sont présents en nombre, avec notamment Akata, Glénat, Kana, Ki-Oon, Ototo, Pika, Vega, mais aussi Izneo, et Manga.io. Si IMHO est à Manga City, Le Lézard Noir préfère rester à la Bulle du Nouveau Monde.
N’oublions pas le toujours réussi pavillon taïwanais mettant en avant quatre titres sortis en 2021 en version française : Des assassins de Chen Uen (Patayo), Somnolences de Pei-hsiu Chen (Actes Sud), Toi et moi le jour de la grande catastrophe de Pam Pam Liu (IMHO) et ROOM de 61Chi (Éditions H). À cela, nous pourrions ajouter 9 Lives Man de Monday Recover (Mahô) et Ichthyophobia de Lung-chieh Li (Nazca). En effet, depuis 2020 et après des années de présence au festival, le pavillon, désormais géré par l’agence TAICCA, réussit à placer en nombre ses bandes dessinées, ce qui se confirmera les années suivantes. Pour celles et ceux qui voudraient approfondir le sujet, le site Bubble propose un dossier intéressant et assez complet.
L’année 2023 est l’occasion de juger un nouveau déménagement de Manga City qui est désormais accolé à la Halle 57 qui héberge l’espace Alligator… 57. On a là un passage obligé totalement dénué d’intérêt à moins d’être fan de skate, de hip-hop ou de vouloir acheter des goodies plus ou moins japonais. L’espace rencontre a malheureusement rétréci (c’est d’ailleurs tout Manga City qui a diminué en surface), et il a été réintégré à la bulle des stands, ce qui le rend particulièrement bruyant. Si la décoration des stands rend l’espace plutôt attractif, l’étroitesse du lieu rend particulièrement pénible sa circulation, surtout le samedi. Dommage…
Le programme des rencontres est intéressant et bien animé, notamment par Julien Bouvard. Akane Torikai est l’invitée japonaise de Manga City. Les trois invités bénéficiant d’une exposition et donc d’une masterclass (payante) sont au Théâtre. Il s’agit de Hajime Isayama, Ryôichi Ikegami et Junji Itô. Pour ce dernier, ça a dû lui faire drôle d’être traité comme une star alors qu’il était venu dans une indifférence quasi-générale quelques années auparavant. Bien entendu, les délégations hongkongaises et taïwanaises sont là avec un nombre conséquent d’autrices et d’auteurs.
Il y a donc trois expositions dédiée au manga, une patrimoniale et deux dites « immersives ». Celle intitulée « Ryôichi Ikegami, à corps perdus » est situé au Musée. Pour une exposition bouche-trou (elle a dû remplacer en urgence celle prévue sur l’œuvre d’Umezu) et un peu hors sujet car consacrée à un auteur de second plan, elle est réussie grâce à une approche intéressante et plutôt centrée sur les scénaristes d’Ikegami. Bravo aux deux co-commissaires, Léopold Dahan et Xavier Guilbert, pour s’en être sorti par le haut. Impossible d’être aussi enthousiaste à propos de l’exposition principale, située au sous-sol de la médiathèque l’Alpha. Elle est consacrée à L’Attaque des Titans. Certes, il y a une belle scénographie et elle bénéficie d’une bande son de qualité. Cependant, l’accumulation de planches sans réel accompagnement en dehors de cartels introductifs abscons fait que cette exposition (payante) se visite en trente minutes maximum. En effet, ce n’est pas la qualité des dessins de Hajime Isayama qui font passer du temps sur chaque planche. La troisième exposition (située à Franquin) est consacrée à Junji Itô, plus exactement aux œuvres publiées chez Mangestu, ce qui en limite sacrément le côté rétrospectif. Là aussi, une belle scénographie met en évidence les limites graphiques du mangaka. L’absence de discours critique (les planches exposées parlent pour l’auteur, n’est-ce pas) réserve cette exposition aux fans de Junji Itô, nombreux depuis que ce dernier bénéficie d’une hype grâce à un retour en grâce de l’horreur auprès d’un certain public.
En 2024 et 2025 : la continuation
Avec la pérennisation de l’espace Alligator 57, nous retrouvons en 2024 une configuration similaire à celle de l’édition précédente, à un détail près, d’importance : le sous-sol de la médiathèque l’Alpha n’accueille plus d’exposition mais un espace dédié aux rencontres. Cela aurait pu nous isoler du bruit ambiant, sauf que l’installation voisine du studio « twitch » de Manga City fait qu’on est régulièrement gêné par le bruit issu des animations dudit studio. À la différence de l’année précédente, le programme n’est pas fou. Il n’y a pas de rencontre avec des mangaka et, pour le reste, il n’y a rien d’indispensable. Moto Hagio, Hiroaki Samura et Shin’Ichi Sakamoto sont les invités venu du Japon mais c’est pour des masterclass au Théâtre (payantes donc).
Manga City bénéficie donc de plus de place, ce qui permet de mieux y circuler. Il faut dire que la fréquentation est aussi en net recul. Au moins, ça donne plus envie d’y retourner pour bavarder avec tel ou tel éditeur. Ceux-ci sont présents en nombre, avec de jolis stands, que ce soit les leurs ou ceux proposés par le Quartier manga, concept lancé par Manga.io à Japan Expo en 2023 et repris aussi à la Foire du livre de Bruxelles en 2024. Plusieurs petits éditeurs tels qu’Asian District, le défunt réunionnais Des bulles dans l’océan, Nouvelle Hydre, Nazca Éditions, naBan, Mahô sont ainsi présents, mais aussi l’américain et très alternatif Glacier Bay Books et le label Combo de Dargaud. Il y a bien sûr les poids lourds tels que Glénat, Kana, Ki-oon, Pika sans oublier les classiques Akata, Delcourt (Tonkam, Soleil Manga, KBooks), Sakka, Panini et les pavillons Taïwan et Hong-Kong.
En plus d’une projection, deux expositions sont consacrées au manga : Il y a surtout celle consacrée à Moto Hagio, tant réclamée par les amatrices et amateurs de la mangaka. Sise au musée d’Angoulême, proposée au public jusqu’à la mi-mars, elle bénéficie d’un catalogue. Il y a aussi celle centrée sur la série L’Habitant de l’infini de Hiroaki Samura, située à l’Espace Franquin, réalisée en partenariat avec Casterman, ce qui confirme une évolution des expositions manga entrevue l’année précédente. Enfin, cette fois en partenariat avec Ki-oon, la projection, assez décevante comparée à celle consacrée à Druillet l’année précédente, met en lumière le titre #DRCL : Midnight Children de Shin’Ichi Sakamoto.
Pas de gros changements en ce qui concerne la bande dessinée asiatique en 2025. L’espace Rencontres retourne dans la bulle manga et l’Alpha accueille à nouveau une exposition, cette-fois consacrée à Vinland Saga. Surtout, il n’y a pas d’exposition manga patrimoniale au Musée d’Angoulême alors que c’était un des points forts du programme depuis 2017. En effet, avec « Kazuo Kamimura : l’estampiste du manga » nous avions pris l’habitude d’avoir une mise en avant de l’histoire du manga sans commune mesure avec ce qui se fait habituellement. Est-ce un loupé ou une nouvelle orientation de la programmation ? La conférence de presse à la fin de l’année nous permettra d’en savoir plus.
Il y a bien trois expositions, deux étant consacrées à une seule œuvre avec un partenariat avec l’éditeur concerné. Dites « immersives », elles ne sont pas sans intérêt, avec une belle scénographie, celle consacrée à Gou Tanabe (à l’Espace Franquin) bénéficie même d’un catalogue. Il y a quand même une petite nouveauté les concernant : il est possible de les visiter en nocturne en contrepartie de l’achat d’un billet. Une excellente idée tant elles sont prises d’assaut durant tout le festival, par exemple celle sur Vinland Saga à l’Alpha. Le cas le plus visible est celui de « L’Atelier des sorciers : la plume enchantée de Kamome Shirahama » car l’exposition est située à l’Hôtel Saint-Simon avec sa jauge très faible.
Contrairement à l’année précédente, le programme de Manga City propose plusieurs rencontres avec des auteurs japonais : Gou Tanabe discutant de Lovecraft avec François Baranger (illustrateur des œuvres de Lovecraft chez Bragelone), Shintaro Kago et Yasutoshi Kurokami. Bien entendu, trois masterclass sont consacrées à Kamome Shirahama, Gou Tanabe et Makoto Yukimura, ce dernier étant déjà venu au festival en 2010. Malheureusement, le bruit est aussi de retour, rendant les rencontres un peu pénibles à suivre à certains moments.
Manga City accueille à peu près les mêmes exposants qu’en 2024, le Quartier manga étant toujours de la partie. Tant mieux, cela permet à de nombreux éditeurs d’être présents, à l’instar d’Asian District, IMHO, Nazca, naBan, Mahô, Panini (eh oui…), Shiba, etc. en plus des habituels poids lourds. Les pavillons Taïwan et Hong-Kong sont là aussi, avec leurs délégations. La fréquentation est bien meilleure qu’en 2024 et les ventes sont excellentes, ce qui ne peut qu’encourager à revenir. La volonté de l’organisation de développer le manga, notamment vers le grand public se trouve ainsi validée.
Les sélections et prix
Voici les différentes sélections proposées de 2021 à 2024. En effet, si l’édition 2021 s’est déroulée en ligne et non à Angoulême, la remise des prix a bien eu lieu, en ligne (et ça fonctionnait très mal). Nous pouvons noter une inflation du nombre de titres depuis la période de confinement. Il est certain que cette augmentation reflète le boom du manga des années 2020 et 2021. Il est juste dommage que la qualité de la plupart des titres sélectionnés pour ces deux années-là soit assez relative, que certains choix sentent un peu trop l’opportunisme et que cela ne montre pas la grande diversité des titres proposés durant cette période. Cela explique peut-être l’absence de prix en 2021 et 2022. Ne parlons pas du ridicule du prix de la série (il faut normalement compter au moins trois tomes) donné en 2025 à DEMENTIA 21, un Kago mineur aseptisé pour le public américain. Enfin, l’absence de titres taïwanais dans ces différentes sélections, alors qu’ils sont proposés en nombre depuis quelques années et que beaucoup sont d’une grande qualité, n’est plus justifiable.
2021
Sélection officielle
Space Brothers – tome 31 de Chûya Koyama (Pika)
Sélection officielle
Sengo – tome 3 de Sansuke Yamada (Casterman)
Sélection patrimoine
Le Marais de Yoshiharu Tsuge (Cornélius)
Sélection patrimoine
Peuple invisible de Shohei Kusunoki (Cornélius)
Sélection patrimoine
Violence & Peace de Shinobu Kaze (Le Lézard Noir)
Sélection jeunesse
Asadora ! – tome 3 de Naoki Urasawa (Kana)
Sélection jeunesse
Spy × Family – tome 1 de Tatsuya Endo (Kurokawa)
2022
Sélection officielle
Le Bateau de Thésée – tome 10 de Toshiya Higashimoto (VEGA-Dupuis)
Sélection officielle
Daruchan de Lemon Haruna (Le Lézard Noir)
Sélection officielle
Mauvaise herbe – tome 4 de Keigo Shinzô (Le Lézard Noir)
Sélection officielle
Natsuko no sake – tome 5 d’Akira Oze (VEGA-Dupuis)
Sélection officielle
Sensor de Junji Itô (Mangetsu)
Sélection officielle
Une brève histoire du robo-sapiens de Toranosuke Shimada (Noeve Grafx)
Sélection patrimoine
L’Envol de Kuniko Tsurita (Atrabile)
Sélection jeunesse
Blue Lock – tome 5 de M. Kaneshiro & Y. Nomura (Pika)
Sélection jeunesse
Un été à Tsurumaki de Shin’ya Komatsu (IMHO)
Sélection jeunesse
Blue Period – tome 6 de Tsubasa Yamaguchi (Pika)
Sélection jeunesse
Je crois que mon fils est gay – tome 2 d’Okura (Akata)
2023
Prix du patrimoine
Fleurs de pierre de Hisashi Sakaguchi (Revival)
Prix de la série
Les liens du sang – tome 11 de Shuzo Oshimi (Ki-oon)
Sélection officielle
Darwin’s Incident – tome 1 de Shun Umezawa (Kana)
Sélection officielle
Fool Night – tome 2 de Kasumi Yasuda (Glénat)
Sélection officielle
Intraitable – tome 6 de Choi Kyu-Sok (Rue de l’échiquier)
Sélection officielle
Gannibal – tome 10 de Masaki Ninomiya (Meian)
Sélection officielle
Peleliu – Guernica of Paradise – tome 11 de Kazuyoshi Takeda (VEGA-Dupuis)
Sélection officielle
La Princesse du château sans fin de Shintaro Kago (Huber)
Sélection éco-fauve
Planètes – tome 1 de Makoto Yukimura (Panini)
Sélection jeunesse
Boys Run The Riot de Keito Gaku (Akata)
Sélection jeunesse
Horiyama – tome 6 de Daisuke Hagiwara & Hero (nobi-nobi)
Sélection jeunesse
La Concierge du Grand Magasin de Tsuchika Nishimura (Le Lézard Noir)
Sélection jeunesse
Ranking of Kings – tome 1 de Sosuke Toka (Ki-oon)
2024
Prix du jury jeunesse
Bâillements de l’après-midi – Tome 1 de Shin’ya Komatsu (IMHO)
Prix du patrimoine
Quatre Japonais à San Francisco de Yoshitaka Kiyama (Onapratut / Le Portillon)
Sélection officielle
Blue Giant Explorer – tome 1 de Shinichi Ishizuka (Glénat)
Sélection officielle
Chainsaw Man – tome 13 de Tatsuki Fujimoto (Crunchyroll)
Sélection officielle
Les Daronnes de Yeong-Shin Ma (Atrabile)
Sélection officielle
Evol – tome 1 d’Atsushi Kaneko (Delcourt)
Sélection officielle
The Fable – tome 13 de Katsuhisa Minami (Pika)
Sélection officielle
Kujô l’implacable – tome 3 de Shôhei Manabe
Sélection officielle
Une chouette vie de Hideyasu Moto (Misma)
Sélection patrimoine
Le Clan des Poe – tome 1 de Moto Hagio (Akata)
Sélection patrimoine
Confidences d’une prostituée de Takao Saitô (Akata)
Sélection patrimoine
Désir sous la pluie de Yoshiharu Tsuge (Cornélius)
Sélection éco-fauve
Le Voyage de Shuna de Hayako Miyazaki (Sarbacane)
Sélection fauve polar
Utsubora – tome 2 d’Asumiko Nakamura (Akata)
Sélection jeunesse
Tsugai – Daemons of the Shadow Realm – tome 1 de Hiromu Arakawa (Kurokawa)
Sélection jeunesse
Tokyo Aliens – tomes 1 à 4 de NAOE (Kana)
2025
Prix de la série
DEMENTIA 21 – tome 2 de Shintaro Kago (Huber)
Sélection officielle
Hirayasumi – tome 4 de Keigo Shinzô (Le Lézard Noir)
Sélection officielle
Saturn Return – tome 10 d’Akane Torikai (Akata)
Sélection officielle
Land – tome 7 de Kazumi Yamashita (Mangetsu)
Sélection officielle
The Summer Hikaru Died – tome 3 de Mokumokuren (Pika)
Sélection patrimoine
Shinkirari – Derrière le rideau, la liberté de Murasaki Yamada (Kana)
Sélection jeunesse
Luca, vétérinaire draconique – tome 1 de Yuma Hirasawa (Glénat)
Après une inflation de titres sélectionnés entre 2022 et 2024 (sélection qui concerne les bandes dessinées sorties l’année précédente et proposées par les éditeurs, rappelons-le), qui donnait une impression de choix souvent sans grand intérêt, retour à une liste plus courte et donc plus intéressante. Car il y avait autant d’excellents titres dans les listes, mais ils étaient noyés dans la « masse ». Tous ces choix, que l’on pourrait qualifier d’anecdotiques, étaient-ils là car ils faisaient consensus au sein du jury plutôt que d’autres propositions plus exigeantes ? Quoi qu’il en soit, une liste à nouveau plus resserrée a redonné une meilleure impression d’excellence. Mais après tout, la sélection ne fait que refléter une réalité : les bons titres sont noyés parmi les blockbusters et les œuvres sans originalité…
Pour terminer, voici les liens vers des galeries photos de Manga City pour les années 2022, 2023, 2024 et 2025. J’en profite pour remercier Manuka pour sa relecture et ses corrections.
À la différence de l’année précédente, je n’avais prévu d’être sur le festival que deux jours et demi au lieu des quatre et demi de 2024, en raison d’un programme peu motivant sur le papier. Une demi-journée perdue pour cause de panne de voiture (heureusement, au départ de l’hôtel le vendredi matin), il ne me restait plus assez de temps pour profiter pleinement de la cinquante-deuxième édition du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême. Du coup, comme peu de rencontres m’intéressaient, j’ai « sacrifié » la bulle du Nouveau Monde par manque de temps au profit des expositions me motivant le plus. J’ai bien fait tant celles-ci étaient variées et réussies cette année, que ce soit celles montées par 9e Art+ ou celles proposées par la Cité.
Les expositions du festival
Sur les neuf expositions « officielles » du festival, je n’en ai fait que cinq. Sur les sept de la Cité, j’en ai fait quatre. Et sur ce total de neuf, quatre ont été faites plutôt rapidement, plus pour voir à quoi elles ressemblaient et prendre des photos (pour éventuellement lire des cartels plus tard). Elles ne m’intéressaient pas plus que cela. Il sera possible de voir de nombreuses photos de la plupart des expos dans le prochain compte rendu « Des Mangaversien·ne·s à Angoulême ».
Le vendredi a été le plus « productif » car en une demi-journée, j’ai visité Plus loin, la nouvelle Science-Fiction puis Super-Héros & cie, l’art des comics Marvel et enfin Lou ! Cher journal… (là, je l’ai plus parcourue qu’autre chose par manque de temps). Clou de la journée : la quasi-inaccessible L’Atelier des sorciers : la plume enchantée de Kamome Shirahama (visitée en nocturne en entrée payante avec horaire choisi). Le samedi, journée habituellement infernale tant il y a du monde partout, a commencé par Posy Simmonds. Herself, suivie par la traversée au pas de course de Constellation graphique, jeunes autrices de la bande dessinée d’avant-garde. Cela s’est ensuite terminé par la visite express (trop de monde, pas d’intérêt pour le sujet, mais j’ai quand même acheté le catalogue) de Gou Tanabe ×H.P. Lovecraft, visions hallucinées. J’ai tout de même eu le temps de remarquer que les planches « originales » du mangaka sont bien plus intéressantes que le produit fini qui est alourdi par les effets informatiques et les trames posées à la truelle. Enfin, le dimanche a été consacré à l’exposition Superman. Le héros aux mille-et-une-vies, tout en profitant de sa proximité (car situé sur le chemin) pour voir l’hommage rendu à Fawzi, le routard du crayon.
La tradition de privilégier les planches originales a été respectée à chaque fois même si les reproductions étaient aussi présentes en nombre. La scénographie était travaillée avec un gros travail sur les décors et les ambiances pour les expositions dites « immersives ». C’était le cas des trois expos mangas (même si je n’ai pas fait celle sur Vinland Saga) ainsi que celles dédiées à Superman, la SF et à Lou.
J’ai beaucoup apprécié l’expo SF pour la diversité des planches et des thèmes même si ça manquait de Fabrice Neaud (l’excellent mais boudé Nu-men, ainsi que Labyrinthus). Par contre, joie ! Il y avait du Édouard Cour avec ReV. Bien entendu, il y avait les habituelles planches de Mézières, mais on ne s’en lasse pas, tout comme celles de Mœbius. L’expo dédiée à Superman était vraiment réussie alors que je n’apprécie pas le personnage et que j’avais quelques doutes étant donné que depuis quelques années, ce n’était pas vraiment ça, les expos au Vaisseau Mœbius. Celles du Musée de la BD étaient, elles aussi, meilleures que celles que la Cité nous proposaient depuis Calvo, un maître de la fable (réalisée à l’époque en partenariat avec 9e Art+, ce qui doit expliquer sa qualité). Les expos au Musée de la BD et au Vaisseau Mœbius sont toujours là (sauf la très bonne expo consacrée à Marvel qui vient de fermer), donc si vous passez dans le coin…
L’exposition consacrée à Posy Simmonds était très intéressante car très différente des deux que nous avions pu voir auparavant (à Pulp Festival et à la BPI), avec un développement intéressant sur les auteurs et autrices qui avaient notablement influencé l’autrice. Elle est visible au Musée d’Angoulême jusqu’à la mi-mars, il est encore possible d’en profiter. Par contre, oubliez Constellation graphique, ça ne présente aucun intérêt. Il faut dire que la BD d’Avant-garde n’a que très rarement eu l’heur de me plaire et là, ce n’était pas le cas.
Des expositions en libre d’accès
Un certain nombre d’expositions sont accessibles sans être festivalier. En effet, entre le Off, le Off du Off et d’autres activités profitant du festival, il y a de quoi faire. De plus, la bande dessinée espagnole était à l’honneur cette année, ce qui se concrétisait, entre autres, par Le 9e Art espagnol à l’honneur sur le parvis de l’Hôtel de Ville qui dressait un intéressant panorama. J’ai profité d’un court instant de répit pour voir ce que l’Association du FIBD proposait cette année : un recensement photographique des fresques BD disséminées dans la ville. Enfin, trois d’entre nous sommes allés à l’exposition-vente Quand la SF se fait prophétesse afin de rendre un dernier hommage à Florian Rubis, co-commissaire mort subitement quelques jours avant l’ouverture du festival et que j’avais prévu de saluer à cette occasion.
Conclusion
Ce fut donc une édition tournée vers les expositions, ce qui est d’ailleurs ce qui nous intéresse le plus à Angoulême (sauf pour l’un d’entre nous qui préfère les rencontres de toutes sortes). Je n’ai suivi que trois rencontres le samedi, la masterclass de Posy Simmonds (qui se déroulait partiellement en même temps que celle de John Romita Jr, il faut le faire…), la rencontre internationale « “So British!” La BD, un art de l’underground ? » avec Bryan Talbot, Joff Winterhart et Jon McNaught mais malheureusement mal animée (il aurait fallu laisser seul Paul « magnific » Gravett aux commandes), et ce qui était presque plus une conférence, « Une femme du Japon, rencontre autour de Shinkirari, de l’autre côté du rideau, la liberté » .
Cela fait peu. J’aurai bien aimé assister à « Super-héros japonais… made in France ! Rencontre avec Mathieu Bablet & Guillaume Singelin, auteurs de Shin-Zero » mais j’étais un peu empêtré dans mes petits problèmes de voiture à 30 kilomètres de là. J’étais plus proche pour « La nouvelle science-fiction » avec Lisa Blumen, Guillaume Singelin, Mathieu Bablet et Ugo Bienvenue, mais je ne pouvais pas arriver assez vite car il y avait un peu trop de chemin à faire entre le Champs de Mars et le Vaisseau Moebius pour le temps dont je disposais. J’ai donc préféré aller à Manga City pour papoter avec quelques copains éditeurs. Chez IMHO, j’ai tout raté : plus de Claude Leblanc en dédicace, et même plus de son nouveau bouquin (mais Benoit s’est arrangé pour corriger ça, et merci à Claude pour sa gentille dédicace après coup). À l’arrivée, c’est une édition qui s’est révélée plus plaisante que prévue grâce à des expositions de grande qualité, ce qui était moins le cas depuis quelques années.
Je remercie 9e Art+, l’Agence La Bande, notamment Arnaud Labory, Anaïs Hervé et Vincent-Pierre Brat, l’Association FIBD Angoulême, la Cité Internationale de la Bande Dessinée et de l’Image pour tout leur travail et la possibilité de nous permettre de profiter du festival dans des conditions privilégiées. Je remercie aussi Manuka pour sa relecture.
Décembre 2024 est passé ; c’est une date anniversaire représentant 20 années d’expositions (avec un petit groupe de Mangaversien·ne·s). Voilà donc une bonne occasion de faire un petit retour en arrière sur 460 visites, après celui fait il y a six ans à l’occasion de ma 300e exposition.
Pour être comptabilisée comme telle, je rappelle que je ne dois pas avoir fait l’exposition seul (il y en a quelques unes dans ce cas, par exemple Goscinny et le cinéma en 2017 ou Alix, l’art de Jacques Martin en 2020 ), elle doit être temporaire tout en ne se limitant pas au temps d’un festival ou d’une convention (ce qui en élimine un certain nombre, notamment lors du FIBD ou du SoBD). Enfin, je dois en avoir une trace photographique (ce qui en élimine deux, de mémoire, dont une en 2002 sur des kimonos).
Quelques chiffres
Pour se remémorer cette période, rien ne vaut quelques petits graphiques et tableaux. Commençons par une représentation du nombre de visites d’exposition par an :
Nous voyons une progression sur la toute fin des années 2000, et qui va jusqu’au pic de 2017, même s’il y a eu un petit décrochage à un moment. Ce pic m’avait d’ailleurs conduit à écrire un billet sur ce qui devenait une boulimie et de la nécessité de se calmer un peu. L’essor du nombre de visites des années 2009-2012 correspond à l’arrivée de beanie_xz sur Paris pour ses études. Son entrée dans le monde du travail a donc provoqué un premier recul. Nous observons aussi un gros décrochage lors des années COVID puis un retour vers la normale qui devrait être atteint en 2023. En effet, si la moyenne annuelle est de 23 expositions, je considère qu’il ne faut pas prendre en compte les 5 premières années et les deux concernées par le COVID, ce qui nous donne une moyenne de 30.
La quantité c’est bien, le contenu, c’est mieux. Le tableau suivant classifie ces 460 expositions selon leur thème principal :
Type
Nombre d’expositions
Architecture
14
Arts
108
BD-Comics-Manga-Illustration
162
Cinéma
13
Culture Asiatique
38
Culture autres régions
25
Culture Occidentale
16
Design
10
Divers
20
Jeux vidéo
3
Jouets
4
Littérature
4
Mode
8
Photo
32
Science
3
Total
460
Deux thèmes d’expositions sont largement devant les autres : la bande dessinée (au sens large) et les arts. Dans ce dernier cas, il s’agit principalement principalement d’expositions (monographiques, ou thématiques) de peintures, d’estampes ou de sculpture. Mais cela peut aussi relever des arts plastiques, décoratifs, être pluridisciplinaire, ou couvrir un ou plusieurs mouvements artistiques, allant du Moyen-âge à l’art contemporain, avec une appétence très nette pour l’impressionnisme et l’art moderne. Bref, ça ratisse très large… Je m’amuse à lister tous ces expositions sur une page web, les personnes curieuses ont ainsi accès à une liste complète et généralement à jour.
À une époque, nous faisions pas mal d’expositions photo mais cela n’est plus vrai depuis plusieurs années. Les manifestations présentant la culture d’un pays ou d’un continent sont souvent les plus fédératrices (par exemple sur les kimonos, l’art de manger en Afrique ou sur une période historique comme la dynastie Tang). Les expositions relevant de la culture occidentale sont généralement historiques (les Étrusques, la Croatie médiévale, la Régence à Paris par exemple). Par contre, l’architecture n’intéresse qu’une toute petite partie de notre groupe de Mangaversien·ne·s.
Il est important aussi de distinguer le type des institutions concernées. Il y a les Musées loin devant les autres espaces culturels (publics ou privés). Cette distinction de la typologie des lieux fait apparaître l’importante prise par les visites en galeries sur les trois dernières années. Il s’agit dans ce cas d’expo-ventes liées au monde de la bande dessinée, nous permettant parfois de profiter d’un vernissage pour rencontrer l’auteur concerné, pouvant faire ainsi nos fanboys ou nos fangirls.
Lieux
Nombre d’expositions
Musées
235
Espaces culturels / Fondations & instituts / Maisons de la culture
147
Galeries
44
Bibliothèques / Médiathèques / Cinémathèques
22
Hôtels de ville / Mairies
9
Autres
3
Les musées sont donc, sans surprise, nos lieux privilégiés. En première place, nous avons le Musée du quai Branly (35). Le Musée Guimet et le Centre Pompidou (29) précèdent ex-æquo de peu le Grand Palais (25). En cinquième position, nous trouvons la Ferme du Buisson (20) à Noisiel, un centre culturel qui proposait de nombreuses petites expositions sur la bande dessinée à l’occasion du Pulp Festival (mais qui duraient au delà du festival). Puis vient le Musée de la bande dessinée d’Angoulême (19). Il ne faut pas confondre ce dernier avec le Musée de la ville d’Angoulême (16) qui suit juste après dans mon classement. En effet, nous profitons du FIBD pour voir les expositions proposées à cette occasion, et elles durent généralement au-delà du célèbre festival de BD. Enfin, la Maison de la culture du Japon à Paris et le Petit Palais (13) ferment ex-æquo la liste des établissements à plus de dix visites.
Comme déjà dit, nous allons de plus en plus dans des galeries d’art pour voir des expositions-ventes de planches originales de BD, surtout depuis le COVID. Dans cette catégorie, la Galerie Barbier (9) est devant la Galerie du 9ème art (6) qui, elle-même, est devant Arts Factory (7). Puis vient la Galerie Martel (4). Néanmoins, c’est la Galerie Huberty & Breyne (3) qui me laisse les meilleurs souvenirs, en raison des auteurs concernés : Fabrice Neaud et Frederik Peeters. Paris regorge de ces lieux, nous pourrions pratiquement y aller toutes les semaines.
Souvenir et nostalgie
Voici une séquence nostalgie avec vingt expositions qui m’ont laissé un excellent souvenir, parfois pour des raisons autre que le thème ou les œuvres proposées.
Première période (2004-2009)
Les débuts, c’est toujours un peu émouvant. Et quels débuts ! Au Grand Palais pour une exposition sur les estampes du Monde Flottant. C’était aussi une époque où les expositions de la Cité des sciences étaient développées, ici sur Le Monde de Franquin. J’ai eu la chance de voir à temps les fameux Musées imaginaires de la bande dessinée au Centre National de la Bande Dessinée et de l’Image d’Angoulême en 2007. Autre exposition non parisienne dont je garde un excellent souvenir, celle consacrée à Émile Cohl au Musée-chateau d’Annecy. Pour clore la période, quoi de mieux que des estampes japonaises ?
Progression (2010-2015)
Il s’agit d’une période d’une grande variété de thèmes avec de la peinture au Grand Palais, de la science-fiction à la Cité des sciences, des phares au Musée de la marine, de la mode aux Arts déco, de la BD (Mézière) à la Mairie du Ve et de l’art contemporain à Beaubourg, Mona Hatoum réussissant l’exploit à me faire voir de l’intérêt dans ce mouvement artistique.
Toujours plus (2016-2019)
L’inflation des expositions ! Il a fallu faire des choix difficiles mais ces quatre ont été particulièrement marquantes : La sonore Grand Orchestre des Animaux à la Fondation Cartier pour l’art contemporain, les photos si déprimantes de Gao Bo. Les offrandes à la Maison Européenne de la Photographie, l’étonnant mélange entre Artistes & Robots au Grand Palais et la musicale Charlie Chaplin, l’homme-orchestre à la Philharmonie de Paris. En fait, j »aurai pu facilement doubler ou tripler le nombre de photos pour ces quatre années.
La période COVID (2020-2021)
Retour aux fondamentaux : la bande dessinée, que ça soit par exemple en galerie avec David B. ou en musée avec Uderzo, a été le thème quasiment unique des expositions vues entre deux confinements et restrictions liées aux jauges.
La reprise (depuis 2022)
Si j’ai choisi de mettre en avant Boldini – Les plaisirs et les jours au Petit Palais, c’est pour montrer que je peux aussi apprécier la peinture figurative, notamment l’art du portrait. L’expo-vente Fabrice Neaud – Le Dernier Sergent à la Galerie Huberty & Breyne illustre l’importance prise par cette activité. Enfin, Métro ! Le Grand Paris en mouvement à la Cité de l’architecture et du patrimoine clos cette rétrospective en 2024, alors que Zombis – La mort n’est pas une fin ? au Musée du quai Branly ouvre une nouvelle période en 2025, ce qui pourrait être le début d’une nouvelle boulimie.